Insee Flash CorseDes jeunes plus diplômés mais moins insérés dans la vie professionnelle

Déborah Caruso, Thomas Dubuis (Insee)

En 2017, parmi les 29 760 jeunes insulaires de 15 à 29 ans non scolarisés, 14 % ne disposent d’aucun diplôme. Néanmoins, depuis 2007, la Corse rattrape progressivement la moyenne nationale en termes de diplômes. En dix ans, la situation face à l’emploi se détériore chez les jeunes quel que soit le diplôme, et c’est une tendance générale. En région, les non-diplômés s’insèrent toujours mieux qu’au niveau national et les titulaires d’un CAP-BEP sont désormais plus souvent en emploi que les bacheliers. L’élévation du niveau des diplômes crée toutefois une concurrence à l’embauche des moins diplômés.

Déborah Caruso, Thomas Dubuis (Insee)
Insee Flash Corse No 55- Novembre 2020

En 2017, parmi les 29 760 jeunes âgés de 15 à 29 ans vivant en Corse et non inscrits dans un établissement d’enseignement, 86 % sont titulaires d’un diplôme (a minima le Brevet des collèges) et 55 % ont au moins un baccalauréat. Toutefois, 14 % ne disposent encore d’aucun diplôme (figure 1). Cette part est plus importante sur l’île qu’au niveau national (12 %) mais c’est dans la région des Hauts-de-France qu’elle est la plus élevée (15 %) en métropole.

Figure 1Répartition du plus haut diplôme détenu par les jeunes de 15 à 29 ans non scolarisés et vivant en Corse

en %
Répartition du plus haut diplôme détenu par les jeunes de 15 à 29 ans non scolarisés et vivant en Corse (en %)
2007 2017
Aucun diplôme 22,1 14,2
CAP-BEP 23,1 23,9
BAC 25,0 29,4
BAC+2 12,5 10,1
BAC+3 ou plus 10,1 15,6
  • Champ : Jeunes de 15 à 29 ans non étudiants ou apprentis vivant en Corse déclarant ne pas être inscrits dans un établissement d’enseignement.
  • Sources : Recensements de la population 2007 et 2017, exploitation complémentaire.

Figure 1Répartition du plus haut diplôme détenu par les jeunes de 15 à 29 ans non scolarisés et vivant en Corse

  • Champ : Jeunes de 15 à 29 ans non étudiants ou apprentis vivant en Corse déclarant ne pas être inscrits dans un établissement d’enseignement.
  • Sources : Recensements de la population 2007 et 2017, exploitation complémentaire.

Un rattrapage du niveau de formation des jeunes insulaires

En dix ans, la part des non-diplômés chez les jeunes diminue dans toutes les régions françaises mais la baisse est plus marquée en Corse. En effet, en 2007, la région comptait la part de jeunes sans diplôme la plus élevée de métropole (22 %), supérieure de 7 points à la moyenne nationale. La Corse rattrape ce retard en divisant cet écart par trois sur la période.

En contre-partie, la proportion de jeunes détenteurs du baccalauréat ou d’un diplôme nécessitant au moins trois ans d’études après le baccalauréat est en nette progression. En Corse, c’est ce niveau qui augmente le plus en dix ans parmi les jeunes ayant arrêté leurs études : + 5,5 points. Cette croissance s’accompagne, comme au niveau national, d’une baisse de la part des détenteurs d’un BAC + 2, traduisant la réforme des formations universitaires dans l’intervalle (réforme LMD : Licence Master Doctorat). Toutefois, cette hausse des plus diplômés est moins marquée que dans les autres régions métropolitaines (+ 9 points en France). Ainsi, en 2017, la Corse compte 16 % de jeunes titulaires d’un BAC + 3 ou plus, une part qui reste plus faible qu’au national (23 %).

En France, la transformation, en 2007, du cursus conduisant au baccalauréat professionnel en trois ans d’études après le collège contre quatre ans auparavant, a participé à l'augmentation de la proportion de bacheliers et à une diminution de la part des diplômés d’un CAP-BEP.

Contrairement à la tendance nationale, la part des jeunes titulaires d’un CAP-BEP continue à progresser en Corse sur la décennie. La proportion régionale des titulaires du CAP-BEP (24 %) reste ainsi une des plus élevées des régions métropolitaines. De même pour le baccalauréat, avec 29 % de jeunes titulaires au mieux d’un diplôme de ce niveau en 2017, l’île est la région où il est le plus représenté après la Bretagne (30 %).

Une dégradation de l’insertion professionnelle plus marquée pour les bacheliers

Suivant le mouvement national, les jeunes insulaires s’insèrent moins bien en 2017 qu’en 2007 sur le marché de l’emploi, et ce quel que soit leur niveau de diplôme (figure 2). En 2017, leur taux d’emploi est de 65 % et baisse de 2 points face à une perte de 5 points au niveau national. Néanmoins, il reste inférieur au taux d’emploi national (68 %).

Le taux d’emploi des bacheliers est le plus affecté. En effet 64 % des jeunes qui ont un baccalauréat comme diplôme le plus élevé sont en emploi contre 70 % dix années plus tôt. Le diplôme continue à se dévaloriser sur le marché du travail de manière encore plus marquée qu’au niveau national (baisse de 8 points du taux d’emploi des bacheliers).

En Corse, l’insertion des autres jeunes se dégrade moins que celle des bacheliers.

En particulier, le taux d’emploi insulaire des titulaires d’un CAP-BEP (65 %) devient meilleur que celui des bacheliers, ces diplômes étant mieux valorisés à l’entrée dans la vie active. Pourtant, en général, le taux d’emploi croit avec le niveau de diplôme détenu.

Enfin, la situation des jeunes non-diplômés insulaires demeure meilleure que dans le reste de l’hexagone (encadré 1). Ainsi, en Corse, la moitié des jeunes sans diplôme occupe un emploi contre un tiers au niveau national. De plus, dans un contexte de forte croissance de l’emploi régional, le taux d’emploi de ces jeunes a relativement peu baissé en région (- 2 points) contrairement au niveau national (- 9 points).

Figure 2Comparaison entre la Corse et la France de la variation du taux d’emploi des jeunes entre 2007 et 2017 selon le diplôme

Variation en points de pourcentage
Comparaison entre la Corse et la France de la variation du taux d’emploi des jeunes entre 2007 et 2017 selon le diplôme (Variation en points de pourcentage)
Diplômes Corse France
Non diplômés -1,9 -8,8
CAP-BEP -2,7 -7,4
BAC -6,4 -8,2
BAC+2 -3,1 -6,5
BAC+3 ou plus -0,2 -2,7
  • Lecture : En Corse, entre 2007 et 2017, le taux d’emploi des jeunes non diplômés sur le marché du travail a diminué de 1,8 points.Il a baissé de 8,8 points dans le même temps en France.
  • Champ : Jeunes de 15 à 29 ans non étudiants ou apprentis vivant en France (hors Mayotte) déclarant ne pas être inscrits dans un établissement d’enseignement
  • Sources : Recensements de la population 2007 et 2017, exploitation complémentaire.

Figure 2Comparaison entre la Corse et la France de la variation du taux d’emploi des jeunes entre 2007 et 2017 selon le diplôme

  • Lecture : En Corse, entre 2007 et 2017, le taux d’emploi des jeunes non diplômés sur le marché du travail a diminué de 1,8 points.Il a baissé de 8,8 points dans le même temps en France.
  • Champ : Jeunes de 15 à 29 ans non étudiants ou apprentis vivant en France (hors Mayotte) déclarant ne pas être inscrits dans un établissement d’enseignement
  • Sources : Recensements de la population 2007 et 2017, exploitation complémentaire.

Les bacheliers investissent les professions moins qualifiées

L’élévation générale du niveau de diplôme amène les jeunes qui vivent en Corse à accepter plus souvent qu’avant un travail moins qualifié que celui auquel leur diplôme leur permettrait de prétendre. Ainsi, la part des non-diplômés parmi les personnes en emploi baisse chez les ouvriers au profit des bacheliers (figure 3). Chez les artisans et chefs d’entreprises, elle diminue également au profit des CAP-BEP.

La croissance de la part des diplômés de troisième cycle au sein des personnes en emploi se fait au détriment de la part des détenteurs d’un BAC + 2 dans les professions intermédiaires notamment celles de la fonction publique. La tendance est similaire pour les cadres et les professions libérales.

Toutefois, les jeunes sans diplôme restent très représentés dans certaines professions : employés de la fonction publique, ouvriers et personnels des services directs aux particuliers : ils y représentent entre 12 % et 18 % des salariés.

Figure 3Évolution de la part des jeunes selon le dipôme et la catégorie sociales entre 2007 et 2017 en points de pourcentage

Évolution de la part des jeunes selon le dipôme et la catégorie sociales entre 2007 et 2017 en points de pourcentage
Catégorie socio-professionnelle BAC+3 ou plus BAC+2 BAC CAP-BEP Aucun diplôme
Ensemble 7,1 -3,0 2,5 0,6 -6,3
Ouvriers 1,9 1,3 6,1 2,6 -13,0
Employés de la fonction publique 3,3 0,4 -4,0 1,6 0,4
Employés hors fonction publique 4,4 -0,9 2,6 0,4 -5,4
Professions intermédiaires fonction publique 21,2 -20,4 3,5 -0,9 -2,1
Professions intermédiaires hors fonction publique 13,2 -8,2 -0,5 -0,1 -4,1
Cadres et professions intellectuelles supérieures 9,2 -3,5 -1,3 -0,8 -2,0
Artisans, commerçants et chefs d’entreprise 2,9 -7,2 4,8 7,9 -7,2
  • Lecture : En dix ans, la part des détenteurs d’un BAC +3 ou plus a augmenté de 21 points parmi les professions intermédiaires de la fonction publique au détriment des détenteurs d’un BAC+2.
  • Champ : jeunes de 15 à 29 ans vivant en Corse ayant un emploi et déclarant ne pas être inscrits dans un établissement d’enseignement
  • Sources : Recensements de la population 2007 et 2017, exploitation complémentaire.

Figure 3Évolution de la part des jeunes selon le dipôme et la catégorie sociales entre 2007 et 2017 en points de pourcentage

  • Lecture : En dix ans, la part des détenteurs d’un BAC +3 ou plus a augmenté de 21 points parmi les professions intermédiaires de la fonction publique au détriment des détenteurs d’un BAC+2.
  • Champ : jeunes de 15 à 29 ans vivant en Corse ayant un emploi et déclarant ne pas être inscrits dans un établissement d’enseignement
  • Sources : Recensements de la population 2007 et 2017, exploitation complémentaire.

Encadré 1 - Non ou peu diplômés : une insertion plus favorable en Corse

La situation des non-diplômés en Corse apparaît plus favorable qu’ailleurs. Le taux d’emploi des 15-29 ans sans diplôme est supérieur à celui que l’on aurait si pour chaque secteur d’activité économique présent dans la région, la proportion des non-diplômés parmi les actifs était celle que l’on observe au niveau national (Méthodologie). Autrement dit, à structure économique identique, les entreprises de Corse emploient en proportion davantage de jeunes non-diplômés que la moyenne des autres régions métropolitaines. Il s’agit là d’un effet régional et non d’un effet de structure.

Encadré 2 - La pandémie fragilise davantage les jeunes sur le marché du travail

La crise économique liée à la pandémie de 2020 est susceptible de remettre en cause ces tendances. Elle fragilise en effet l’insertion des jeunes sur le marché du travail. Au cœur du premier confinement lié à la crise sanitaire, les chiffres des demandeurs d’emploi inscrits en catégorie A, B, C à Pôle emploi ont augmenté chez les moins de 25 ans de 61 % entre le 1er et le 2nd trimestre 2020 et de 59 % en un an. Au troisième trimestre 2020, l’évolution des demandeurs d’emploi chez les moins de 25 ans augmente encore de + 21 % en un an. C’est la catégorie d’âge où l’augmentation est la plus forte. Levier d’ajustement en main-d’œuvre pour les employeurs, les jeunes sont les plus exposés en période de crise, et l’accès à l’emploi en fonction du niveau de diplôme pourrait s’en trouver bouleversé.

Pour comprendre

Méthodologie

Pour chacun des croisements secteurs d’activité (64 postes) et catégories socioprofessionnelles on peut calculer l’effectif attendu des jeunes de 15 à 29 ans que l’on obtiendrait sur un territoire si la répartition des emplois par diplômes y était identique à la répartition nationale. L’écart relatif entre le nombre d’emplois des jeunes attendu par diplôme et celui recensé permet de mesurer la sur ou sous représentation des diplômes dans l’emploi d’un territoire.

Taux d’emploi : Le taux d’emploi d’une classe d’individus est calculé en rapportant le nombre d’individus de la classe ayant déclaré avoir un emploi au nombre total d’individus dans la classe.

Sources

Les résultats sont issus des recensements de la population de 2007 et 2017, et font référence au diplôme de niveau le plus élevé que les individus ont déclaré posséder. Les questions relatives à l’emploi et au chômage reposent sur la déclaration « spontanée » de la personne enquêtée, sans précision de critères. Contrairement à celles de l’enquête Emploi, elles ne permettent pas de mesurer les concepts d’emploi, ou de chômage au sens du Bureau international du travail (BIT).

Champ

Cette étude porte sur les jeunes de 15 à 29 ans non étudiants ou apprentis vivant en Corse déclarant ne pas être inscrits dans un établissement d’enseignement. En se limitant aux personnes ayant achevé leurs études, on exclut du champ les jeunes en situation de cumul emploi-scolarité. De plus, sont exclues du champ les personnes originaires de l’île mais qui l’ont quitté pour leurs études ou des raisons professionnelles.

Pour en savoir plus

Adéquation emploi-niveau de diplôme une situation dans la moyenne de la province, Insee Analyses Corse n° 8, janvier 2016

Le non‑emploi des peu ou pas diplômés en France et en Europe : un effet classement du diplôme, Insee Références « Emploi, chômage, revenus du travail », Édition 2020.

Fiches sur l’insertion des jeunes, Insee Références « Formations et emploi », Édition 2018.