Insee Analyses NormandiePrès de 4 000 personnes âgées dépendantes supplémentaires dans la Manche d’ici à 2030

Antoine Le Graët, Martial Maillard, Pauline Roger (Insee)

Dans le département de la Manche, les personnes de 60 ans ou plus sont surreprésentées au sein de la population, en raison notamment de l’attractivité de ce territoire auprès des jeunes retraités. Ces seniors représentaient 30 % des habitants en 2016, une proportion qui pourrait atteindre 38 % en 2030. En 2019, 15 % des Manchois âgés de 60 ans ou plus, soit 24 300 personnes, sont confrontés à des problèmes d’autonomie à des degrés divers. Ils pourraient être 3 800 de plus d’ici à 2030. Par conséquent, et même si le département de la Manche est relativement bien doté en hébergements pour personnes âgées dépendantes, 1 200 emplois à temps plein supplémentaires pourraient être nécessaires à l’horizon 2030 pour aider ces personnes dépendantes, qu’elles soient hébergées en structures ou qu’elles vivent à domicile.

Insee Analyses Normandie
No 75
Paru le :Paru le14/02/2020
Antoine Le Graët, Martial Maillard, Pauline Roger (Insee)
Insee Analyses Normandie No 75- Février 2020

2 février 2024 : Les projections de personnes dépendantes (utilisées dans cette publication) reposent sur des projections d’espérance de vie sans dépendance, qui font actuellement l’objet d’une correction. Elles feront l’objet d’une première actualisation la semaine du 4 mars par la Drees. Par ailleurs, comme c’est le cas tous les 4 ou 5 ans, l’Insee et la Drees procéderont en fin d’année à une nouvelle révision de ces projections, pour intégrer les projections démographiques les plus récentes, qui ont un impact sur le nombre de personnes âgées dépendantes. Cet exercice donnera lieu à de nouvelles publications.

En 2016, 151 600 habitants du département de la Manche sont âgés de 60 ans ou plus, soit un peu plus de 30 % des Manchois. Cette part, plus élevée qu’en France métropolitaine de 5 points, positionne le département au 30ᵉ rang en métropole et s’accroît d’année en année. En 1999, cette tranche d’âge ne rassemblait que 24 % des Manchois, et pourrait atteindre 38,1 % en 2030. Les personnes de 75 ans ou plus représentent quant à elles 12,1 % de la population départementale, une proportion également plus élevée qu’en France métropolitaine (9,4 %). Estimer les évolutions de ces populations permet d’anticiper les politiques publiques visant à développer l’offre destinée aux personnes âgées, en particulier aux seniors en perte d’autonomie.

Les seniors, une population très présente dans les territoires manchois

Dans la Manche, les seniors sont plus nombreux dans les Communautés d’Agglomération (CA) du Cotentin, Saint-Lô Agglo et Mont-Saint-Michel-Normandie, soit les territoires les plus peuplés du département. À l’exception de la CA du Cotentin, les seniors sont proportionnellement plus présents au sein de chacun des territoires de la Manche qu’ils ne le sont à l’échelle régionale ou nationale. Cette part atteint même plus de 30 % de la population dans six EPCI manchois sur huit, plutôt ruraux (figure 1).

Figure 1Le littoral ouest de la Manche, un territoire attractif pour les seniorsNombre et part des 60 ans ou plus par EPCI en 2016

Le littoral ouest de la Manche, un territoire attractif pour les seniors
EPCI Libellé de l’EPCI Nombre de 60 ans ou plus en 2016 Part de 60 ans ou plus en 2016 (en %)
Manche
200042604 CC de Granville, Terre et Mer 16 800 37,9
200042729 CC de la Baie du Cotentin 7 400 31,9
200043354 CC de Villedieu Intercom 5 000 31,9
200066389 CA Saint-Lô Agglo 21 200 27,9
200067023 CC Coutances Mer et Bocage 15 800 33,0
200067031 CC Côte Ouest Centre Manche 7 600 34,0
200067205 CA du Cotentin 48 500 26,8
200069425 CA Mont-Saint-Michel-Normandie 29 300 33,3
Limitrophe de la Manche
200069516 CC Seulles Terre et Mer 4 200 24,9
200069524 CC Pré-Bocage Intercom 5 800 23,3
200070670 CC du Pays de Dol et de la Baie du Mont-Saint-Michel 7 200 30,4
200070688 CC Couesnon Marches de Bretagne 6 200 28,2
200071520 CC Domfront Tinchebray Interco 5 400 33,3
200072452 CA Fougères Agglomération 15 700 28,3
241400555 CC de Bayeux Intercom 9 500 31,6
200066801 CC Isigny-Omaha Intercom 8 000 29,7
200068443 CC Andaine - Passais 5 100 38,4
200068799 CC Intercom de la Vire au Noireau 14 200 29,7
  • Source : Insee, recensement de la population 2016 – exploitation principale

Figure 1Le littoral ouest de la Manche, un territoire attractif pour les seniorsNombre et part des 60 ans ou plus par EPCI en 2016

  • Source : Insee, recensement de la population 2016 – exploitation principale

Les seniors pourraient être la seule tranche d’âge en croissance d’ici à 2030

Si les tendances démographiques récentes se prolongeaient (), le nombre de seniors manchois progresserait de 17 % d’ici à 2030, passant de 161 500 personnes en 2019 à 189 500 en 2030 (figure 2). Cette augmentation s’expliquerait par le glissement en âge des générations, mais aussi, pour un tiers de la population supplémentaire, par l’excédent migratoire dû à l’attractivité du territoire manchois pour les retraités.

Figure 2Entre + 14 % et + 22 % de seniors dans les territoires manchois entre 2019 et 2030Évolution projetée du nombre de seniors entre 2019 et 2030 par territoire et par tranche d’âge selon le scénario tendanciel

Entre + 14 % et + 22 % de seniors dans les territoires manchois entre 2019 et 2030
Population en 2019 Population en 2030 Évolution absolue 2019-2030 Évolution 2019-2030 (en %) Évolution annuelle moyenne 2019-2030 (en %)
Département de la Manche 161 470 189 530 + 28 060 + 17,4 + 1,5
dont CA du Cotentin 51 660 61 550 + 9 890 + 19,1 + 1,6
CA Mont-Saint-Michel-Normandie 31 230 35 750 + 4 520 + 14,5 + 1,2
CC de Granville, Terre et Mer et CC Villedieu Intercom 23 830 29 030 + 5 200 + 21,8 + 1,8
CA Saint-Lô Agglo 22 580 25 820 + 3 240 + 14,3 + 1,2
CC Coutances Mer et Bocage 16 860 19 900 + 3 040 + 18,0 + 1,5
CC de la Baie du Cotentin et CC Côte Ouest Centre Manche 15 310 17 480 + 2 170 + 14,2 + 1,2
dont 60-74 ans 100 100 108 290 + 8 190 + 8,2 + 0,7
75-84 ans 38 110 55 780 + 17 670 + 46,4 + 3,5
85 ans ou plus 23 260 25 460 + 2 200 + 9,5 + 0,8
  • Source : Insee, Omphale 2017

La population des 75 à 84 ans progresserait plus fortement, de 17 700 personnes, soit une hausse de 46 % entre 2019 et 2030 qui s’explique par l’arrivée à ces âges des générations issues du baby-boom de l’après-guerre. La hausse serait moins forte pour les 60 à 74 ans et les 85 ans ou plus (figure 2). Parallèlement à cette croissance de la population âgée, chacune des classes d’âge de moins de 60 ans serait en recul entre 2019 et 2030 selon le scénario tendanciel. La croissance de la population des seniors resterait importante quelles que soient les hypothèses sur l’allongement de la vie. En effet, la Manche compterait 194 700 seniors en 2030 selon le et 186 500 selon le .

Le vieillissement démographique s’annonce à un rythme relativement élevé à l’horizon 2030, mais il devrait encore s’accélérer entre 2030 et 2050. La population de plus de 60 ans poursuivrait sa progression (+ 9 %), et vieillirait elle-même du fait d’une très forte poussée des 85 ans ou plus (+ 86 %), conséquence de l’arrivée dans cette classe d’âge des générations du baby-boom. En revanche, les 60 à 74 ans devraient amorcer un repli (– 12 %). Parallèlement, la population de moins de 60 ans continuerait de baisser (– 8 %). De ce fait, et alors que la prise en charge de la dépendance nécessitera de créer des emplois, le nombre d’actifs en âge d’occuper ces emplois diminuerait.

D’ici à 2030, tous les territoires manchois seraient concernés par la progression de la population âgée. Celle-ci serait plus marquée sur le territoire composé de la Communauté de Communes (CC) Granville, Terre et Mer, et de la CC Villedieu Intercom (+22 %). Les trois quarts de cette hausse seraient dus à l’attractivité de ce territoire pour les jeunes retraités, qui compterait ainsi 46 % de seniors dès 2030. Le vieillissement serait également plus marqué dans la CA du Cotentin pour laquelle seul un effet pyramide des âges serait en cause, ce territoire connaissant un léger déficit migratoire chez les seniors. En effet, les quinquagénaires sont aujourd’hui plus présents au sein de ce territoire qu’au niveau départemental (16 % contre 15 %). La population âgée augmenterait de 18 % dans la CA Coutances Mer et Bocage, dont la moitié proviendrait de l’excédent migratoire.

Dans les autres territoires, cette croissance serait moins forte (+ 14 %). Dans la CA de Saint-Lô Agglo, les quinquagénaires sont aujourd’hui moins présents (14 %) et ce territoire est moins attractif pour les jeunes retraités. La croissance de la population des 60 à 74 ans serait ainsi plus faible et la part de seniors convergerait vers le niveau régional en 2030 (32 %). Dans la CA Mont-Saint-Michel-Normandie et dans le territoire qui rassemble les CC de la Baie du Cotentin et Côte Ouest Centre Manche, l’excédent migratoire participerait pour moitié à la hausse du nombre de seniors. Pour autant, cette croissance serait moins vive qu’ailleurs, ces territoires présentant une part de seniors déjà de 2 à 3 points plus élevée que la Manche dans son ensemble.

Une dépendance des seniors s’inscrivant dans la tendance nationale

En fonction de son degré, la revêt différents visages, allant du besoin d’une aide ponctuelle pour la toilette, la préparation des repas ou le ménage jusqu’à l’altération grave des fonctions physiques ou cognitives, dans le cas de la dépendance sévère.

La concerne environ 24 300 seniors dans la Manche en 2019 sur la base d’enquêtes menées auprès des personnes de plus de 60 ans, soit 15,1 % des 60 ans ou plus. Pourtant, le nombre de bénéficiaires de l’Allocation Personnalisée d’Autonomie (APA) est moins élevé (9 700 en 2016). Cet écart peut résulter à la fois d’une différence de cotation de la dépendance entre les enquêtes précitées et la grille d’évaluation à l’APA, ou encore parce que des bénéficiaires potentiels n’y ont pas eu recours, du fait d’un manque d’orientation, ou encore parce que l’intérêt économique serait trop faible. La part départementale de personnes âgées dépendantes est comparable au niveau national (figure 3). Avec l’âge, la perte d’autonomie devient plus fréquente. Ainsi, entre 60 et 74 ans, 6,4 % des seniors sont touchés, contre 29,8 % des 75 ans ou plus. Au niveau national, 15 % des 60-64 ans présentaient au moins une limitation fonctionnelle en 2014, 30 % des 75-79 ans, 65 % des 85-89 ans et 75 % des 90-94 ans (source : Drees, enquête Vie quotidienne et santé 2014).

Figure 3Plus âgées, les femmes sont davantage touchées par la dépendance Indicateurs sur la dépendance des seniors en 2019

Plus âgées, les femmes sont davantage touchées par la dépendance
Manche France métropolitaine
Nombre de seniors en situation de dépendance Taux de dépendance (en %) Taux de dépendance (en %)
Ensemble dont dépendance sévère Ensemble dont dépendance sévère Ensemble dont dépendance sévère
Ensemble 24 290 6 340 15,1 4,0 15,0 4,1
dont Hommes 8 180 1 860 11,4 2,6 12,1 2,8
Femmes 16 110 4 480 18,1 5,0 17,3 5,1
60-74 ans 6 360 800 6,4 0,8 6,5 0,9
75 ans ou plus 17 930 5 540 29,8 9,2 30,2 9,8
À domicile 18 700 3 400 12,1 2,2 12,2 2,3
En institution 5 590 2 940 90,9 47,8 91,0 54,1
  • Sources : Insee, Omphale, Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees)

En situation de dépendance moyenne ou sévère, les femmes sont davantage prises en charge en structures d’hébergement que les hommes (25,5 % contre 18,1 %). Ces parts atteignent respectivement 50,2 % et 37,3 % dans le cas de la dépendance sévère. En effet, les femmes vivent en moyenne plus longtemps et sont également souvent plus jeunes au sein des couples. Les hommes peuvent ainsi bénéficier jusqu’à un âge plus avancé de l’aide de leur conjointe.

Les accueillent très majoritairement des personnes dépendantes (91 %), dont près de la moitié le sont sévèrement. Toutefois, « rester chez soi » demeure le mode de vie largement majoritaire des seniors en perte d’autonomie puisque, en 2019, 77 % d’entre eux vivent à domicile. Même parmi les personnes âgées sévèrement dépendantes, le maintien à domicile est la situation la plus fréquente (54 %).

Bien développés, les services d’aide favorisent le maintien à domicile

L’entrée en structure d’hébergement est conditionnée par différents facteurs tels que le niveau de dépendance, la présence et la disponibilité de l’entourage, ou encore les moyens financiers. L’offre institutionnelle est, au regard du public concerné, légèrement plus développée dans la Manche qu’en France métropolitaine (figure 4). Elle relève aussi davantage du secteur public, aux tarifs moins élevés. Celui-ci rassemble 74,1 % de la capacité d’accueil départementale, positionnant le département au 22e rang des mieux dotés en métropole. Grâce à cette offre plus abondante et financièrement accessible, les personnes âgées en perte d’autonomie vivent davantage en hébergement qu’au niveau national (23,0 % contre 21,6 %).

Figure 4Un département relativement mieux doté en offre d’hébergementPlaces en structures d’hébergement et profils des résidents

Un département relativement mieux doté en offre d’hébergement
Nombre de places en structures d’hébergement en 2015 Nombre de places en structures d’hébergement pour 100 personnes âgées dépendantes en 2019 Taux d’institutionnalisation des 75 ans ou plus en 2019 (en %) Part des personnes âgées dépendantes qui vivent en structures d’hébergement en 2019 (en %) Part des personnes âgées sévèrement dépendantes qui vivent en structures d’hébergement en 2019 (en %) Part des places en structures d’hébergement occupées par des personnes âgées sévèrement dépendantes en 2019 (en %)
Manche 5 960 25,3 9,1 23,0 46,4 47,8
Calvados 7 370 27,1 9,6 24,6 50,2 49,9
Orne 4 380 29,6 11,2 28,5 57,7 57,2
Eure 4 580 23,2 8,2 21,6 48,2 56,2
Seine-Maritime 10 780 22,0 8,4 19,9 47,2 55,9
France métropolitaine 589 500 23,8 8,8 21,6 47,0 54,1
Rang de la Manche * 42 40 51 41 55 86
  • * : parmi les 96 départements métropolitains
  • Sources : Insee, recensement de la population 2015, exploitation complémentaire, Omphale ; Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees)

Les places en structures d’hébergement sont moins souvent occupées par des seniors sévèrement dépendants qu’au niveau national (47,8 % contre 54,1 %), la Manche ne se situant qu’au 86ᵉ rang des départements métropolitains pour cette proportion. Les services d’aide sont par ailleurs bien développés dans le département et favorisent ainsi le maintien à domicile. La Manche possède ainsi un bon équipement en places de services de soins infirmiers à domicile (SSIAD), au 33ᵉ rang des 96 départements métropolitains, avec 20,9 places pour 1 000 habitants de 75 ans ou plus. De même, le recours à l’aide professionnelle à domicile est plus fréquent, au 5ᵉ rang des départements métropolitains. Il concerne 39 personnes de 75 ans ou plus sur 100 contre 32 au niveau national (pour en savoir plus).

À l’horizon 2030, 3 800 personnes âgées en perte d’autonomie supplémentaires

Si les tendances démographiques actuelles se poursuivent (méthodologie), la Manche compterait, en 2030, 29 000 seniors de plus qu’en 2019, dont 3 800 personnes âgées dépendantes supplémentaires (soit une augmentation de 15,6 %). La prise en charge de ces personnes âgées dépendantes supplémentaires relèverait probablement, compte tenu de leur nombre, surtout des services à domicile (avec les conséquences budgétaires afférentes pour le Département). La dépendance sévère devrait augmenter moins fortement et concerner 300 personnes de plus en 2030 (+ 4,6 %). Le besoin de places supplémentaires en structures pourrait ainsi être modéré si la collectivité privilégie le maintien à domicile des seniors moyennement dépendants.

Au-delà de 2030, le nombre de seniors dépendants pourrait s’accroître à un rythme plus soutenu, de 4 800 personnes dans la décennie 2031-2040, et encore de 2 000 au cours de la suivante.

Si le nombre de places disponibles en hébergements était maintenu à son niveau de 2015, soit 5 960 places, 3 800 personnes dépendantes supplémentaires vivraient à domicile en 2030 par rapport au niveau de 2019 (+ 20 %), dont 160 personnes très dépendantes (+ 5 %). Dans ce scénario, seuls 52 % des résidents en institution seraient sévèrement dépendants.

Dans l’hypothèse où l’objectif serait de maintenir la répartition actuelle, en proportion, des personnes âgées entre domicile et structures d’hébergement par tranche d’âge et niveau de dépendance, 1 100 places supplémentaires seraient nécessaires, soit une centaine par an (figure 5). Mais malgré ces places supplémentaires, 2 900 personnes dépendantes de plus qu’en 2019 vivraient à leur domicile, soit 15 % de plus, dont 160 sévèrement dépendantes. Dans ce scénario, seuls 44 % des résidents en institution seraient en perte d’autonomie sévère.

Figure 529 000 personnes âgées supplémentaires à l’horizon 2030, un enjeu fort pour le maintien à domicile ?Évolution du nombre de seniors à domicile et en structures d’hébergement à l’horizon 2030, selon le scénario d’évolution du nombre de places en hébergements

29 000 personnes âgées supplémentaires à l’horizon 2030, un enjeu fort pour le maintien à domicile ?
Nombre de seniors Évolution 2019-2030
2019 À domicile 154 430
En structures d’hébergement (1) 5 960
Ensemble 160 390
2030 - Hypothèse de maintien du nombre de places en structures d’hébergement au niveau de 2015 À domicile 183 510 + 29 080
En structures d’hébergement (2) 5 960 0
Ensemble 189 470 + 29 080
2030 - Hypothèse de maintien de la répartition actuelle des personnes âgées entre domicile et structures d’hébergement À domicile 182 510 + 28 080
En structures d’hébergement (3) 7 050 + 1 090
Ensemble 189 560 + 29 170
  • (1) dernier nombre de places connu, en 2015.
  • (2) dans un scénario d’affectation prioritaire aux dépendants sévères des places en plus ou en moins par rapport à l’hypothèse d’évolution du nombre de places proportionnelle à la population.
  • (3) dans cette hypothèse, la croissance du nombre de places en structures d’hébergement est proportionnelle à la population par tranche d’âge et niveau de dépendance.
  • Note : le nombre total de seniors en 2030 varie en fonction des hypothèses de créations de places en institution car celles-ci attirent des seniors venus d’autres départements.
  • Sources : Insee, Omphale ; Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees)

Par conséquent, c’est bien dans la politique de maintien à domicile des personnes âgées dépendantes que se trouvent les principaux enjeux des prochaines décennies. En effet, le taux d’occupation des établissements par des personnes âgées sévèrement dépendantes resterait, dans ces deux hypothèses, relativement faible. Une politique d’admission en structures d’hébergement réorientée en faveur des personnes âgées les plus dépendantes permettrait donc d’accueillir le surplus de cette population, en concentrant l’essentiel des moyens sur les services de maintien à domicile qui seront confrontés à une forte croissance des besoins de prise en charge.

Plus d’un millier d’emplois supplémentaires pour répondre à la montée de la dépendance d’ici à 2030

En 2019, dans la Manche, l’accompagnement des personnes âgées dépendantes mobilise 8 860 emplois à temps plein (ETP), qu’il s’agisse de fonctions administratives, médico-sociales ou sanitaires. La prise en charge de la perte d’autonomie en établissements génère à elle seule 4 030 ETP, soit deux emplois à temps plein pour trois résidents de plus de 60 ans, tous emplois confondus (y compris les agents de services et les professions liées aux autres services). Au regard de l’évolution prévisionnelle du nombre de personnes âgées dépendantes, la prise en charge en hébergements nécessiterait 520 ETP supplémentaires en 2030 (figure 6). Parmi ce personnel, les agents de service et les aides soignants devraient connaître la plus forte croissance, avec respectivement 160 et 150 ETP supplémentaires, suivis par les professions médicales et sociales (+ 90 ETP).

Figure 6Des besoins dans les différentes professions liées à la dépendanceNombre d’emplois liés à la dépendance, en équivalent temps plein

Des besoins dans les différentes professions liées à la dépendance
2019 2030 Évolution
En structures d’hébergement 4 030 4 550 + 520
dont professions d’aides soignants 1 330 1 480 + 150
agents de services 1 050 1 210 + 160
professions médicales, y compris infirmiers 480 520 + 40
professions sociales 380 430 + 50
professions liées à l’encadrement 320 370 + 50
professions liées aux autres services 470 540 + 70
À domicile 4 830 5 510 + 680
dont aides à domicile 1 870 2 120 + 250
aides-ménagères 1 540 1 780 + 240
infirmiers 950 1 090 + 140
autres professionnels 470 520 + 50
Ensemble 8 860 10 060 + 1 200
  • Sources : Insee, Omphale ; Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (Drees)

L’aide professionnelle à domicile fait appel à 4 830 ETP en 2019. Pour accompagner et assurer les soins des seniors en perte d’autonomie qui resteront à domicile, 680 ETP supplémentaires seraient nécessaires en 2030, dont les trois quarts sur des postes d’aides à domicile ou d’aides-ménagères.

À l’horizon 2030, 10 000 ETP devraient ainsi être mobilisés pour prendre en charge les seniors en perte d’autonomie dans la Manche, soit 1 200 emplois à créer au cours des 10 prochaines années. Dans un contexte de diminution du nombre de Manchois en âge d’être actifs, pourvoir ces emplois constituera un enjeu important pour le territoire départemental.

Pour comprendre

Les projections de population de personnes âgées dépendantes sont adossées au modèle Omphale sur la base d’hypothèses de prolongement des tendances démographiques récentes et formulées à partir de trois composantes : la fécondité, la mortalité et les migrations (scénario tendanciel).

Des taux de dépendance et de dépendance sévère sont ensuite appliqués à chaque sexe et âge, pour chaque année de la projection. Les personnes dépendantes sont ensuite réparties entre structures d’hébergement et vie à domicile, selon la règle suivante : la répartition actuelle des seniors moyennement dépendants et sévèrement dépendants dans le département est maintenue.

L’évolution dans le temps de la prévalence de la dépendance repose sur une hypothèse de répartition des gains d’espérance de vie entre années de dépendance et sans dépendance, dans les proportions observées en 2015 au sein de l’espérance de vie à 60 ans.

Définitions

Les scénarios démographiques « espérance de vie haute » et « espérance de vie basse » reprennent les hypothèses de fécondité et de migrations du scénario tendanciel. Le premier suppose des gains d’espérance de vie parallèles à la tendance « haute » de la projection nationale. Au niveau France, l’espérance de vie atteindrait 93 ans pour les femmes et 89,5 ans pour les hommes en 2050. Le second est basé sur l’hypothèse inverse : au niveau national, l’espérance de vie atteindrait 88,3 ans pour les femmes et 84,5 ans pour les hommes en 2050. En 2018, l’espérance de vie s’établit à 85,3 ans pour les femmes et à 79,4 ans pour les hommes. Dans chaque scénario, l’espérance de vie progresserait donc d’ici à 2050.

Une personne dépendante ou en perte d’autonomie a besoin d’aide pour accomplir les gestes essentiels de la vie quotidienne (toilette, déplacements, tâches domestiques, etc.).

Dans cette étude, deux approches de la dépendance sont considérées :

1. La grille Autonomie Gérontologique Groupe Iso-Ressources (AGGIR) permet, à partir d’une évaluation effectuée par un professionnel du Conseil Départemental, de classer les personnes âgées en six groupes iso-ressources (GIR) en fonction de leur degré de perte d’autonomie. La dépendance concerne ici les personnes classées en GIR 1 à 4. Ces dernières peuvent bénéficier de l’APA. Les GIR 1 et 2 correspondent à la dépendance sévère (confinement au lit ou au fauteuil et/ou altération grave des fonctions cognitives). Les personnes en situation de dépendance moyenne (GIR 3 et 4) peuvent avoir besoin d’aide pour se déplacer, s’habiller ou faire leur toilette. Les personnes faiblement dépendantes (GIR 5 et 6) sont considérées comme non dépendantes dans cette étude.

2. Des enquêtes nationales réalisées par la Drees permettent d’évaluer la population de 60 ans ou plus par GIR estimés au niveau départemental : combinaison des enquêtes Vie Quotidienne et Santé 2014 et Capacités, Aides et Ressources des seniors pour les personnes vivant à domicile, enquête auprès des établissements d’accueil pour personnes âgées (EHPA).

Un senior vit en structure d’hébergement s’il vit soit en établissement d’hébergement pour personnes âgées (EHPA), soit en établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD), soit en unité de soins de longue durée (USLD), soit dans une résidence autonomie (anciennement « logement foyer ») adossée à un EHPAD. S’il ne vit pas en institution, un senior est considéré comme vivant à domicile, y compris les seniors domiciliés dans une résidence autonomie non adossée à un EHPAD.

Pour en savoir plus

Brunel M., Carrère A., « Ouvrir dans un nouvel ongletIncapacités et perte d’autonomie des personnes âgées en France : une évolution favorable entre 2007 et 2014 », Les dossiers de la Drees, n° 13, mars 2017.

Brunel M., Carrère A., « Ouvrir dans un nouvel ongletLa perte d’autonomie des personnes âgées à domicile. Quelles disparités entre départements ? », Les dossiers de la Drees, n° 34, avril 2019.

Larbi K., « 4 millions de seniors seraient en perte d’autonomie en 2050 », Insee Première, n° 1767, juillet 2019.