Insee Analyses CorseÀ l’horizon 2030, 50 000 actifs cesseraient leur activité

Michel Akiki (Insee)

L’arrivée en fin de vie active des générations du baby boom se conjugue avec le vieillissement démographique et constituent un défi pour le renouvellement des populations actives régionales. En Corse, d’ici 2030, 50 250 personnes pourraient cesser leur activité, soit 40 % des actifs en emploi en 2015. Malgré une part importante de seniors, la région serait toutefois moins concernée que d’autres, en raison d’un taux d’emploi des 55-70 ans plus faible.

Sur l’île, le secteur administration, enseignement, santé humaine et action sociale serait particulièrement impacté, mais le privé ne serait pas exempt. En particulier, certains secteurs comme le transport-entreposage et l’agriculture et plusieurs métiers (chefs d’entreprises, cadres commerciaux…) ont des taux de retrait supérieurs à la moyenne régionale. Les deux principales zones d’emploi de l’île (Ajaccio et Bastia) connaîtraient les volumes de départs les plus importants, mais le taux de cessation serait plus élevé dans celle de Sartène-Propriano.

Michel Akiki (Insee)
Insee Analyses Corse No 27- Décembre 2019

Le vieillissement démographique et l’arrivée en fin de vie active des générations nombreuses du baby boom constituent un défi pour le renouvellement de la population active. En effet, outre l’enjeu sur l’équilibre financier du système des retraites, ces nombreux départs du marché du travail pourraient fragiliser la transmission des connaissances et compétences dans les entreprises. Ils questionnent également les politiques publiques de formation professionnelle des plus jeunes ou des demandeurs d’emploi. Toutes les régions sont concernées mais la Corse, du fait d’une population plutôt âgée, pourrait être en première ligne.

Anticiper les retraits d’actifs à l’horizon 2030 et préciser les secteurs et les métiers les plus concernés permettra aux acteurs publics régionaux d’en maîtriser les enjeux. Pour autant, le nombre de cessations d’activité n’impliquera pas symétriquement un volume de postes disponibles à l’identique. La croissance différenciée des secteurs, les gains de productivité et le progrès technologique sont autant de facteurs, susceptibles de transformer les métiers et la demande d’emploi des entreprises à l’horizon 2030.

4 actifs sur 10 cesseraient leur activité d’ici 2030

En tenant compte des réformes législatives récentes, notamment le recul de l’âge légal de la retraite et un allongement progressif de la durée de cotisation requise, 50 250 départs de fin de carrière pourraient survenir en Corse entre 2016 et 2030 (méthodologie). Ce volume de cessations d’activité resterait constant sur la période observée, avec 16 000 à 17 000 départs par tranche quinquennale. Ainsi, à l’horizon 2030, 40 % des actifs en emploi en Corse en 2015 devraient avoir cessé leur activité. Ce taux de retrait placerait l’île au niveau de la moyenne de France de province et au 7ᵉ rang des régions (figure 1).

Figure 1La Corse, septième région française pour les cessations d’activitéTaux de cessation d’activité entre 2016 et 2030 par région

(en%)
La Corse, septième région française pour les cessations d’activité ((en%))
Régions (numéros) Régions (libellés) Taux de cessation
11 Île-de-France 36,6
24 Centre-Val de Loire 41,1
27 Bourgogne-Franche-Comté 41,1
28 Normandie 40,4
32 Hauts-de-France 38,5
44 Grand Est 40,1
52 Pays de la Loire 38,2
53 Bretagne 39,6
75 Nouvelle-Aquitaine 41,1
76 Occitanie 40,3
84 Auvergne-Rhône-Alpes 38,9
93 PACA 40,7
94 Corse 40,2
  • Source : Insee, recensement 2015 - exploitation complémentaire, enquête emploi en continu 2003 - 2016, modèle Destinie 2

Figure 1La Corse, septième région française pour les cessations d’activitéTaux de cessation d’activité entre 2016 et 2030 par région

  • Source : Insee, recensement 2015 - exploitation complémentaire, enquête emploi en continu 2003 - 2016, modèle Destinie 2

Ces départs importants s’expliquent, en premier lieu, par le poids démographique des seniors. Les régions avec les plus fortes proportions de 50-70 ans dans la population en âge de travailler se retrouvent en général en première ligne face au renouvellement de leur population active (figure 2).

Figure 2Les cessations d’activités fortement dépendantes du poids démographique des seniorsTaux de cessation d’activité en fonction du taux de senior dans la population active

(en%)
Les cessations d’activités fortement dépendantes du poids démographique des seniors ((en%)) - Lecture : la droite de régression permet de prévoir une valeur attendue du taux de retrait en fonction du poids des seniors
Régions Taux de seniors Taux de cessation
Centre-Val de Loire 39,6 41,1
Bourgogne-Franche-Comté 40,1 41,1
Normandie 39,1 40,4
Hauts-de-France 36,0 38,5
Grand Est 37,9 40,1
Pays de la Loire 37,4 38,2
Bretagne 39,2 39,6
Nouvelle-Aquitaine 40,7 41,1
Occitanie 38,9 40,3
Auvergne-Rhône-Alpes 36,5 38,9
Provence-Alpes-Côte d'Azur 39,2 40,7
CORSE 39,5 40,2
France de Province 38,3 39,9
  • Lecture : la droite de régression permet de prévoir une valeur attendue du taux de retrait en fonction du poids des seniors
  • Source : Insee, recensement 2015 - exploitation complémentaire, enquête emploi en continu 2003 - 2016, modèle Destinie 2

Figure 2Les cessations d’activités fortement dépendantes du poids démographique des seniorsTaux de cessation d’activité en fonction du taux de senior dans la population active

  • Lecture : la droite de régression permet de prévoir une valeur attendue du taux de retrait en fonction du poids des seniors
  • Source : Insee, recensement 2015 - exploitation complémentaire, enquête emploi en continu 2003 - 2016, modèle Destinie 2

Or, la Corse avec 39,5 % de seniors se situe 1 point au-dessus de la moyenne de France de province et en quatrième position du classement des régions vieillissantes. Toutefois, le taux de cessation régional se situe légèrement en dessous du niveau attendu. Cela s’explique par un taux d’emploi des seniors plus faible dans la région (encadré).

Un âge moyen de départ à 61,4 ans

Ces retraits du marché du travail concerneraient mécaniquement les 50-70 ans de 2015, qui auront 65 ans ou plus en 2030. Ainsi 94 % cesseraient leur activité à cet horizon. Cela représenterait 7 cessations sur 10. Cependant 14 500 actifs de 35 à 49 ans en 2015 pourraient également être concernés. Ils cesseraient leur activité de façon anticipée pour une retraite précoce (statuts spéciaux, droits spécifiques liés à la pénibilité des métiers, carrières longues...), mais aussi pour d’autres motifs. En effet, si les cessations d’activités sont généralement des départs à la retraite (71 %), elles comprennent également les personnes qui ne travaillent plus pour des raisons de santé (10 %), ou volontairement (9 %), ou se retrouvent au chômage (10 %).

L’âge moyen de fin de carrière pour la période 2015-2030 s’établirait ainsi à 61,4 ans sur l’île. Plus la catégorie socio-professionnelle est élevée, plus les départs sont tardifs, aux alentours de 62 ans pour les cadres de la fonction publique et des banques. Au contraire, les ouvriers partiraient autour de 60 ans : leur carrière débute en général plus tôt et la pénibilité de leurs postes peut permettre un départ anticipé. Enfin, les indépendants prolongeraient plus volontiers leur activité. Ainsi les agriculteurs et patrons d’hôtels-restaurants quitteraient le monde du travail à 63 ans ; les chefs d’entreprise à 64 ans et les médecins et professionnels du droit à 65 et 66 ans.

Des départs importants dans les secteurs publics...

Le secteur administration publique, enseignement, santé humaine et action sociale concentre 35 % de l’emploi en 2015. Il pourrait être particulièrement impacté avec 18 400 actifs quittant leurs postes entre 2016 et 2030, soit 42 % de ses effectifs (2 points de plus qu’en moyenne régionale). Ainsi ces départs représenteraient 37 % des cessations d’activité (figure 3).

Figure 3L’administration devra faire face à un fort renouvellement de ses agents d’ici 2030Nombre de départs à l’horizon 2030 par secteur en Corse (plus de 1 500 départs par secteur)

L’administration devra faire face à un fort renouvellement de ses agents d’ici 2030
Secteurs Taux de senior (en %) Nombre de cessations Taux de cessation (en %) Secteur
Agriculture, sylviculture et pêche 42,2 2 090 49,4 activités marchandes
Industrie 29,2 3 179 41,1 activités marchandes
Construction 27,5 5 105 38,7 activités marchandes
Commerce 26,3 7 134 36,7 activités marchandes
Transports et entreposage 31,7 3 189 43,5 activités marchandes
Hébergement et restauration 28,8 2 809 37,3 activités marchandes
Activités financières et d’assurance 33,0 2 066 41,0 activités marchandes
Activités spécialisées* 26,4 2 639 35,0 activités marchandes
Autres activités de services 30,2 2 985 39,1 activités marchandes
Administration 33,2 7 927 43,9 secteur administré
Enseignement 31,4 3 514 41,8 secteur administré
Santé 32,6 3 934 38,8 secteur administré
Médico-social** 31,8 3 015 42,3 secteur administré
  • * Médico-social : Hébergement médico-social et social et action sociale sans hébergement
  • ** Activités spécialisées : Activités juridiques, comptables, de gestion, d’architecture, d’ingénierie, de contrôle et d’analyses techniques, activités spécialisées scientifiques et recherche développement
  • Source : Insee, recensement 2015 - exploitation complémentaire, enquête emploi en continu 2003 - 2016, modèle Destinie 2

Figure 3L’administration devra faire face à un fort renouvellement de ses agents d’ici 2030Nombre de départs à l’horizon 2030 par secteur en Corse (plus de 1 500 départs par secteur)

  • * Médico-social : Hébergement médico-social et social et action sociale sans hébergement
  • ** Activités spécialisées : Activités juridiques, comptables, de gestion, d’architecture, d’ingénierie, de contrôle et d’analyses techniques, activités spécialisées scientifiques et recherche développement
  • Source : Insee, recensement 2015 - exploitation complémentaire, enquête emploi en continu 2003 - 2016, modèle Destinie 2

En particulier, ce n’est pas moins de 7 900 agents de l’administration publique qui devraient quitter le monde du travail avant 2030 (soit un taux de retrait de 44 %). Notamment, dans la fonction publique, la moitié des employés de catégorie B et des cadres de catégorie A cesseraient leur activité d’ici 2030. Si le taux de retrait anticipé des agents de catégorie C est inférieur (44 %), le nombre de départs dans ces emplois serait tout de même élevé puisqu’ils sont majoritaires dans la fonction publique corse (figure 4).

Figure 4Les 17 métiers les plus impactésLes métiers avec plus de 500 départs et un taux de cessation supérieur à la moyenne régionale (40 %)

Les 17 métiers les plus impactés
Familles professionnelles Cessations (en nombre) Taux de cessation (en %)
Agents d'entretien 2 980 47
Employés administratifs de la fonction publique (catégorie C et assimilés) 2 430 44
Enseignants 2 200 45
Conducteurs de véhicules 1 810 43
Ouvriers qualifiés du gros œuvre du bâtiment 1 650 44
Aides à domicile et aides ménagères 1 570 50
Agriculteurs, éleveurs, sylviculteurs, bûcherons 1 490 48
Cadres de la fonction publique (catégorie A et assimilés) 1 470 49
Maîtrise des magasins et intermédiaires du commerce 1 450 46
Professions intermédiaires administratives de la fonction publique (catégorie B et assimilés) 1 390 50
Patrons et cadres d'hôtels, cafés, restaurants 1 300 49
Médecins et assimilés 890 56
Maraîchers, jardiniers, viticulteurs 750 43
Cadres des services administratifs, comptables et financiers 740 50
Employés des services divers 630 47
Cadres commerciaux et technico-commerciaux 600 44
Techniciens et agents de maîtrise de la maintenance 550 43
  • Source : Insee, recensement 2015 - exploitation complémentaire, enquête emploi en continu 2003 - 2016, modèle Destinie 2

Ce fort taux de cessation dans l’administration est la conséquence d’une pyramide des âges vieillissante (33 % de seniors contre 30 % pour l’ensemble des secteurs). Les dernières réformes des retraites accroissent l’âge moyen de départ et les seniors restent plus longtemps dans les effectifs. De plus, le non remplacement partiel des départs à la retraite induit de plus faibles entrées de jeunes.

De même, le secteur de l’enseignement dénombrerait connaître 3 500 départs d’ici 2030. Le taux de retrait des enseignants serait notamment supérieur à la moyenne régionale. La situation pourrait également être tendue dans le secteur hébergement médico-social et social et action sociale sans hébergement où un fort taux de cessation est envisagé (42 % pour 3 000 départs). Or, ces activités seront a contrario fortement demandeuses de main-d’œuvre dans un contexte d’allongement de l’espérance de vie et de vieillissement de la population qui suscitent des besoins croissants en matière d’accompagnement et d’accueil des personnes âgées. Et ce, alors même, que parmi les métiers les plus impactés, on trouve également les aides à domicile et ménagères.

Les activités relevant de la santé humaine enregistreraient près de 3 900 départs, soit 39 % des effectifs. La situation des médecins et assimilés serait la plus critique. Plus de 56 % cesseraient leur activité d’ici 2030, soit près de 900 médecins en moins. Cela pourrait entraîner ou accentuer des difficultés de recrutements sur des métiers dont l’accès est soumis à l’obtention de diplômes spécifiques et dont le nombre est encadré. À l’inverse, les aides-soignants, les infirmiers et les sages-femmes seraient moins concernés par le renouvellent de leurs actifs (moins de 35 % de cessations) grâce à une moyenne d’âge plus jeune.

Enfin, le métier d’agent d’entretien, dont 7 sur 10 évoluent dans cet ensemble de secteurs, pourrait connaître également des départs massifs. C’est ainsi le premier métier concerné en Corse avec près de 3 000 agents. C’est un métier plutôt âgé (43,7 ans, soit un an et deux mois de plus que la moyenne des actifs corses) et dans lequel les seniors sont sur représentés.

... mais aussi quatre actifs sur dix des secteurs marchands

Dans les secteurs marchands de l’économie insulaire, en moyenne 39 % des actifs quitteraient le marché du travail à l’horizon 2030, soit un point de moins que la moyenne de l'île. Cela représente toutefois un volume élevé de départs (31 900) avec des variations importantes selon les secteurs ou les métiers.

En particulier, les secteurs les plus employeurs de l’île, enregistreraient des taux de cessation inférieurs à la moyenne insulaire : construction (39 %), hébergement-restauration (37 %) et commerce (37 %). Ce sont, en effet, des secteurs traditionnellement jeunes. Mais compte tenu de leur poids dans l’emploi, cela représenterait tout de même 15 000 départs d’actifs.

De plus, certaines professions seraient beaucoup plus impactées. C’est le cas dans le commerce, des agents de maîtrise des magasins et intermédiaires du commerce et des cadres commerciaux et technico-commerciaux. Pour l’hôtellerie-restauration, ce sont les patrons et cadres d’hôtels, cafés, restaurants qui pourraient voir 49 % de leurs effectifs cesser leur activité avant 2030. Cela soulève la question de la transmission de leurs établissements, comme pour l’ensemble des dirigeants d’entreprise qui seraient fortement concernés avec 47 % de départs (cf. « 2 500 entreprises susceptibles d’être à transmettre d’ici dix ans », Insee Analyses Corse n° 18, 2018).

Au contraire, parmi les principaux secteurs employeurs, celui du transport et l’entreposage aurait le taux de retrait le plus important (43 %) soit 3 200 départs. Les conducteurs de véhicule sont notamment touchés dans cette même proportion. D’autres secteurs, moins importants en volume d’emplois, ont également des taux de départ plus élevés. En particulier, l’agriculture devrait être fortement impactée (49 %, soit 2 100 cessations) en lien avec une pyramide des âges défavorable : les seniors y représentent 42 % des actifs contre 30 % en moyenne sur l’île. Enfin, l’industrie avec 41 % d’actifs partants serait moyennement impactée, y compris les activités agro-alimentaires. Les activités de services auraient des taux de retrait peu importants sauf le segment des activités immobilières (43 %).

Un taux de départ plus important dans la zone d’emploi de Sartène - Propriano

Les zones d’emploi ne seraient pas uniformément concernées par la problématique des départs de fin de carrière. Si les volumes les plus importants sont logiquement dans les zones d’Ajaccio et de Bastia qui concentrent l’emploi, les taux de cessation varieraient de 38 % dans la zone d’emploi de Calvi-L’Île-Rousse à 43 % pour celle de Sartène-Propriano (figure 5). Au niveau des territoires, comme au niveau régional, les taux de retrait sont corrélés avec le taux de senior au sein de la population en âge de travailler. Toutefois, la structure des emplois dans chaque zone est aussi un élément déterminant du nombre de départs. Certains métiers présentent des problématiques de renouvellement similaires dans toutes les zones d’emploi : agents d’entretiens, aides à domiciles, employés de la fonction publique de catégorie B et C et conducteurs de véhicules. D’autres métiers, signe d’un profil économique territorial spécifique, ressortent à un niveau géographique plus fin.

Figure 5Calvi – L’Île-Rousse moins impactée par les départs à l’horizon 2030Nombre et taux de cessation d’activité à l’horizon 2030 par zone d’emploi

Calvi – L’Île-Rousse moins impactée par les départs à l’horizon 2030
Code zone d’emploi Zone d’emploi Nombre cessations Taux de cessation
9401 Ajaccio 18 777 40,9
9402 Porto Vecchio 4 235 39,3
9403 Sartene 1 771 43,3
9404 Bastia 18 286 39,9
9405 Calvi 3 068 37,6
9406 Corte 1 756 40,3
9407 Ghisonaccia 2 356 40,5
  • Source : Insee, recensement 2015 - exploitation complémentaire, enquête emploi en continu 2003 - 2016, modèle Destinie 2

Figure 5Calvi – L’Île-Rousse moins impactée par les départs à l’horizon 2030Nombre et taux de cessation d’activité à l’horizon 2030 par zone d’emploi

  • Source : Insee, recensement 2015 - exploitation complémentaire, enquête emploi en continu 2003 - 2016, modèle Destinie 2

Ainsi, la zone d’emploi d’Ajaccio, se démarque dans les professions intellectuelles : les cadres des services administratifs, comptables et financiers (54 %), les médecins (54 %), les cadres A de la fonction publique (52 %), les cadres commerciaux (51 %) et les enseignants (48 %) connaîtraient des taux de cessation nettement au-dessus de la moyenne régionale.

Dans celle de Bastia, les métiers les plus impactés par des taux de retrait élevés sont plus diversifiés. Ainsi, les enseignants et les cadres A de la fonction publique verraient 47 % de leurs effectifs cesser leur activité. Mais le caractère plus rural de cette zone entraînerait aussi de forts départs au sein des agriculteurs, éleveurs, sylviculteurs, bûcherons (47 %) ainsi que pour les maraîchers, jardiniers, viticulteurs (44 %). Des métiers du commerce et de la restauration tels que les maîtrises des magasins et intermédiaires du commerce et les patrons et cadres d’hôtels, cafés, restaurants seraient également touchés (respectivement 44 % et 43 %). Les quatre zones d’emploi que sont Porto-Vecchio, Calvi-l’Île-Rousse, Sartène-Propriano et Corte présentent quant à elles, un profil économique plus orienté vers l’hébergement, le commerce et la restauration avec un ensemble de métiers de services. Certains sont vieillissants et de fait pleinement concernés par les cessations d’activités dans un futur proche. Ainsi, les patrons et cadres d’hôtels, cafés, restaurants connaîtraient un taux de départ très élevés, avec un pic à 60 % dans la zone d’emploi de Sartène-Propriano. De même, plus d’une personne sur deux exerçant le métier de maîtrise des magasins et intermédiaires du commerce cesserait son activité avant 2030 (53 %). Enfin, la zone d’emploi de Ghisonaccia-Aléria offre un profil davantage tourné vers l’agriculture. Les agriculteurs, éleveurs, sylviculteurs, bûcherons et les maraîchers, jardiniers, viticulteurs pourraient alors perdre respectivement 48 % et 45 % de leurs effectifs d’ici 2030. Ce seraient aussi les métiers avec les plus importants volumes de départs.

Taux d’emploi plus faible chez les seniors, mais des conditions salariales plus favorables

En Corse, le taux d’emploi des 50-70 ans est plus faible qu’en France de province (42,8 % contre 43,4 %). Cela cache deux réalités différentes. Les 50-59 ans sont moins régulièrement en emploi (67,2 % contre 73,9 %). Au contraire, le taux d’emploi des seniors les plus âgés, les 60-70 ans est nettement supérieur (18,9 % contre 13,0 % en France de province), en lien avec l’importance des emplois non salariés dans l’économie de l’île (17,8 % des emplois corses contre 12,3 % en France de province). En effet, les indépendants restent plus régulièrement en emploi après 60 ans : 13,6 % contre 6,1 % pour les salariés. Les seniors les plus âgés sont donc plus présents dans l’ensemble de la population en emploi (figure 6).

Figure 6En Corse, les 60-70 ans plus présents dans l’emploiPart de la population active en emploi par âge en 2015 (en %)

En Corse, les 60-70 ans plus présents dans l’emploi
Part de la population active en emploi (en %)
Age (années) Corse France métropolitaine
15 0,1 0,1
16 0,2 0,2
17 0,2 0,3
18 0,4 0,4
19 0,6 0,7
20 0,8 0,9
21 1,1 1,2
22 1,2 1,4
23 1,5 1,6
24 1,7 1,8
25 1,8 2,0
26 2,0 2,1
27 1,9 2,2
28 2,1 2,2
29 2,1 2,3
30 2,3 2,3
31 2,3 2,4
32 2,2 2,4
33 2,4 2,5
34 2,4 2,5
35 2,5 2,5
36 2,4 2,5
37 2,4 2,4
38 2,5 2,5
39 2,5 2,6
40 2,6 2,6
41 2,7 2,7
42 2,8 2,8
43 2,9 2,8
44 3,0 2,8
45 2,9 2,8
46 2,9 2,8
47 2,9 2,7
48 2,7 2,8
49 2,8 2,8
50 2,7 2,8
51 2,8 2,7
52 2,6 2,7
53 2,5 2,6
54 2,4 2,5
55 2,3 2,4
56 2,2 2,3
57 2,1 2,2
58 2,0 2,1
59 1,8 1,8
60 1,5 1,3
61 1,2 0,9
62 1,1 0,6
63 0,8 0,5
64 0,7 0,4
65 0,4 0,2
66 0,3 0,2
67 0,3 0,1
68 0,2 0,1
69 0,1 0,1
70 0,1 0,1
total 100,0 100,0
  • Source : Insee, recensement 2015 - exploitation principale

Figure 6En Corse, les 60-70 ans plus présents dans l’emploiPart de la population active en emploi par âge en 2015 (en %)

  • Source : Insee, recensement 2015 - exploitation principale

Généralement, les seniors bénéficient de conditions d’emploi plus favorables que les plus jeunes.

En CDI pour la plupart (95 % des salariés, soit six points de plus que l’ensemble des 15-70 ans), ils valorisent leur expérience et bénéficient ainsi de salaires plus élevés (15 % de rémunération en plus que les 35-49 ans). Ils sont cependant moins diplômés : la part des 50-70 ans diplômés du supérieur est inférieure à celle de l’ensemble des actifs (27 % contre 32 %). Et 29 % d’entre eux ne possèdent aucun diplôme (contre 21 % en moyenne).

Pour comprendre

L’estimation du nombre de départs de fin de carrière est basée sur un modèle qui considère les personnes en emploi en 2015 (recensement de la population au lieu de travail calé sur les enquêtes emploi) et les fait vieillir jusqu’en 2030, en décidant chaque année s’il est plus probable qu’elles poursuivent leur activité ou qu’elles quittent leur emploi.

Les probabilités dépendent du sexe, de l’âge, de la catégorie socio-professionnelle, du diplôme et du régime de retraite.

Elles sont estimées par des enquêtes emploi en continu de 2003 jusqu’à 2016, ainsi que des projections de probabilités de cessation d’activité élaborées par le modèle de micro simulations Destinie 2.

Seuls les actifs de 51 ans sont étudiés pour les départs de fin de carrière, et tous les actifs de 70 ans partent l’année suivante à la retraite.

Ces projections intègrent les réformes du système des retraites votées jusqu’en 2014. Par contre ne sont pas prises en compte les migrations éventuelles des actifs, leurs mobilités entre les secteurs d’activité et les reconversions professionnelles.

Cette méthode est appliquée de 2016 jusqu’à 2030, bien que les premières années relèvent du passé .

Définitions

Senior : personne dont l’âge est compris entre 50 et 70 ans.

Départ de fin de carrière : retrait définitif du marché du travail, ce qui recouvre les situations suivantes :

- passage de l’emploi à la retraite ou à la préretraite

- passage de l’emploi à l’inactivité pour raisons de santé

- entrée au chômage des personnes âgées de 59 ans ou plus

- retrait du marché du travail, c’est-à-dire personne qui ne travaille pas ou plus et déclare ne pas vouloir travailler

Taux de retrait : rapport entre le nombre de départs de fin de carrière entre 2016 et 2030 à la population en emploi en 2015. Il peut être calculé par secteur ou par métier.