L’industrie de la viande : premier secteur des industries alimentaires, touché par des crises répétées
En 2016, l’industrie de la viande réalise un quart du chiffre d’affaires des industries alimentaires en France, soit 33 milliards d’euros. Près de 60 % provient d’entreprises de 250 salariés ou plus. Pour les entreprises de première transformation de la viande, l’activité ralentit depuis quinze ans en raison des crises sanitaires et économiques. En revanche, les entreprises de préparation industrielle à base de viande dégagent plus de valeur ajoutée et sont plus dynamiques, à l’instar de l’ensemble des industries alimentaires.
Une activité ralentie par plusieurs crises
L’industrie de la viande comprend les activités d’abattage et de transformation des viandes de boucherie et de volaille, mais aussi la préparation industrielle de produits à base de viande. En 2016, 2 600 entreprises, au sens des unités légales, sont dans ce secteur et emploient 99 000 salariés en équivalent temps plein. Premier secteur des industries alimentaires en France devant les produits laitiers, son chiffre d’affaires s’élève à 33 milliards d’euros, soit le quart du chiffre d’affaires total. Entre 2000 et 2016, il augmente en moyenne annuelle de 1,4 %, contre 2,4 % pour l’ensemble des industries alimentaires (figure 1). Le repli de l’activité sur certaines périodes est lié à des crises sanitaires, pesant sur la consommation de viande, comme l’encéphalopathie spongiforme bovine en 2000, la fièvre aphteuse du mouton en 2001, la grippe aviaire en 2005 et 2016 et le scandale de la viande de cheval en 2013. La concurrence des pays européens et émergents ainsi que la crise économique de 2008 ont aussi ralenti l’activité. L’activité de préparation industrielle de produits à base de viande est moins touchée par ces crises, même si elle progresse moins que l’ensemble des industries alimentaires. Après trois années moroses, 2017 semble être une année de légère reprise pour l’industrie de la viande.
tableauFigure 1 - Évolution du chiffre d’affaires des industries alimentaires, de l’industrie de la viande et de ses composantes entre 2000 et 2017
Année | Industries alimentaires | Industrie de la viande | Transformation et conservation de la viande de boucherie | Transformation et conservation de la viande de volaille | Préparation industrielle de produits à base de viande |
---|---|---|---|---|---|
2000 | 100,0 | 100,0 | 100,0 | 100,0 | 100,0 |
2001 | 105,8 | 105,9 | 103,3 | 110,1 | 106,9 |
2002 | 108,1 | 105 | 102 | 105,7 | 109,5 |
2003 | 109,8 | 105,5 | 102,5 | 105,6 | 110,6 |
2004 | 112,7 | 108,9 | 107,4 | 106,5 | 114,6 |
2005 | 112,9 | 108,4 | 108,5 | 102,6 | 114,6 |
2006 | 116,6 | 111,3 | 113,5 | 101,1 | 118,6 |
2007 | 124,5 | 115,1 | 113,9 | 111,1 | 124,4 |
2008 | 131,5 | 118 | 117,5 | 115,8 | 126,3 |
2009 | 124,7 | 114,7 | 115,2 | 111,6 | 121,3 |
2010 | 129,2 | 116,9 | 117,3 | 114,5 | 123,4 |
2011 | 138,1 | 122,9 | 125,4 | 121,6 | 126,9 |
2012 | 142,5 | 126,7 | 129,7 | 124,4 | 131,3 |
2013 | 144,1 | 128,3 | 129,7 | 128,6 | 133,9 |
2014 | 144,7 | 127,2 | 126,9 | 127,9 | 135,1 |
2015 | 144,7 | 125,9 | 122,7 | 127,6 | 137,7 |
2016 | 145,4 | 125,1 | 122,3 | 126,1 | 136,2 |
2017 | 150,9 | 127,1 | 125,2 | 129,3 | 136,8 |
- Note : indices de chiffre d’affaires sur les ventes en valeur, y compris à l’exportation, séries brutes.
- Champ : France, hors Guyane et Mayotte.
- Sources : DGFiP, Insee.
graphiqueFigure 1 - Évolution du chiffre d’affaires des industries alimentaires, de l’industrie de la viande et de ses composantes entre 2000 et 2017
La viande de boucherie domine le secteur
Les entreprises de 250 salariés ou plus réalisent 59 % du chiffre d’affaires du secteur alors qu’elles ne représentent que 3 % du nombre total d’entreprises (figure 2). À l’inverse, les petites structures (moins de 10 salariés) sont très nombreuses, mais elles génèrent seulement 3 % du chiffre d’affaires.
Un tiers des entreprises du secteur, souvent les plus grandes, appartiennent à un groupe de sociétés. Elles réalisent 92 % du chiffre d’affaires du secteur. Huit sur dix appartiennent à un groupe dont l’activité dominante est l’industrie de la viande. Les autres sont dans des groupes spécialisés dans le commerce de produits alimentaires ou la production d’autres produits alimentaires.
La viande de boucherie génère un peu plus de la moitié du chiffre d’affaires de l’industrie de la viande, la volaille un cinquième et les produits à base de viande un quart. Face aux difficultés rencontrées, les entreprises industrielles de viande de boucherie tendent à diversifier leur activité en fabriquant des produits de seconde transformation (12 % de leur activité, + 4 points en quatre ans).
tableauFigure 2 - Répartition par tranche d’effectifs salariés du nombre d’entreprises, du chiffre d’affaires et de la valeur ajoutée de l’industrie de la viande
De 0 à 9 salariés | De 10 à 249 salariés | 250 salariés ou plus | |
---|---|---|---|
Nombre d’entreprises | 59 | 38 | 3 |
Chiffre d’affaires hors taxes | 3 | 38 | 59 |
Valeur ajoutée | 3 | 36 | 61 |
- Note : les effectifs salariés sont exprimés en équivalent temps plein.
- Lecture : en 2016, 59 % des entreprises de l’industrie de la viande emploient de 0 à 9 salariés en équivalent temps plein.
- Champ : France, hors Mayotte.
- Source : Insee, Ésane 2016.
graphiqueFigure 2 - Répartition par tranche d’effectifs salariés du nombre d’entreprises, du chiffre d’affaires et de la valeur ajoutée de l’industrie de la viande
Un secteur qui dégage de faibles marges
L’industrie de la viande crée moins de valeur ajoutée que l’ensemble des industries alimentaires. En effet, son taux de valeur ajoutée (rapport de celle-ci sur le chiffre d’affaires) est de 17,6 % en 2016, soit 1,7 point de moins que celui de l’ensemble des industries alimentaires (figure 3) ; cet écart est stable depuis cinq ans. Ce taux est particulièrement faible pour la viande de boucherie (16,5 %) tandis qu’il est plus élevé pour la préparation industrielle de produits à base de viande (19,9 %). Il peut être affecté notamment par les exigences des normes de santé et de qualité.
Dans la valeur ajoutée dégagée au coût des facteurs, le taux de marge, soit la part qui reste à disposition de l’entreprise après rémunération des salariés, est nettement plus faible dans l’industrie de la viande que dans l’ensemble des industries alimentaires (21 % contre 32 %). Cette activité nécessite en effet plus d’emplois par unité de production que le reste des industries alimentaires ; la masse salariale y est donc plus importante. Toutefois, cet écart se réduit depuis cinq ans en raison du redressement des marges après la fin des crises sanitaires.
Même s’il progresse légèrement depuis cinq ans, le taux d’investissement est également assez faible (14 %), excepté pour les produits industriels à base de viande (18 %).
tableauFigure 3 - Chiffres clés des industries alimentaires, de l’industrie de la viande et de ses composantes
Secteur | Nombre d’entreprises | Chiffre d’affaires | Valeur ajoutée | Taux de valeur ajoutée | Taux de marge aux coûts des facteurs | Taux d’investissement | Taux d’exportation |
---|---|---|---|---|---|---|---|
en millions d’euros | en % | ||||||
Industrie de la viande | 2 586 | 32 953 | 5 790 | 17,6 | 20,5 | 14,0 | 10,6 |
Transformation et conservation de la viande de boucherie | 1 337 | 17 620 | 2 911 | 16,5 | 22,7 | 11,6 | 11,9 |
Transformation et conservation de la viande de volaille | 406 | 6 754 | 1 174 | 17,4 | 17,5 | 14,5 | 12,4 |
Préparation industrielle de produits à base de viande | 843 | 8 579 | 1 705 | 19,9 | 18,9 | 17,6 | 6,3 |
Industries alimentaires | 13 307 | 137 319 | 26 475 | 19,3 | 32,0 | 18,1 | 20,6 |
- Champ : France, hors Mayotte.
- Source : Insee, Ésane 2016.
La grande distribution, premier client des produits à base de viande
Comme pour l’ensemble des industries alimentaires, le chiffre d’affaires de l’industrie de la viande est majoritairement réalisé auprès de la grande distribution (figure 4). L’autre part des ventes concerne notamment des professionnels qui la revendent en gros, la transforment de façon industrielle ou l’utilisent dans la restauration. Le secteur de la préparation industrielle de produits à base de viande, en aval de la filière, est logiquement celui qui se tourne le plus vers la grande distribution (61 % de son chiffre d’affaires).
L’activité est essentiellement tournée vers le marché français, avec des produits de qualité souvent labellisés, dans un contexte de forte concurrence internationale.
tableauFigure 4 - Répartition du chiffre d’affaires de l’industrie de la viande par type de clientèle
Client | Répartition du chiffre d’affaires par type de clientèle |
---|---|
Grande distribution | 51 |
Particuliers | 2 |
Commerce de détail | 6 |
Grossistes | 20 |
Industriels transformateurs | 15 |
Restaurants, cantines, cafés, etc. | 6 |
- Champ : France, hors Mayotte.
- Source : Insee, Ésane 2016.
graphiqueFigure 4 - Répartition du chiffre d’affaires de l’industrie de la viande par type de clientèle
Un taux de sous-traitance plus élevé dans le secteur de la volaille
En 2016, 24 % des entreprises de l’industrie de la viande ont recours à la sous-traitance, contre 20 % dans l’ensemble des industries alimentaires (figure 5). Proportionnellement à sa production, le secteur de la volaille sous-traite le plus, notamment à des éleveurs d’animaux (4 % contre 1 % pour les deux autres secteurs).
Avec 330 millions d’euros de dépenses publicitaires en 2016, le taux d’effort publicitaire de l’industrie de la viande atteint 1,0 %, contre 2,6 % pour l’ensemble des industries alimentaires. Les organismes professionnels participent aussi à l’effort de promotion du secteur. Les dépenses publicitaires sont plus importantes pour les produits à base de viande (2,7 %). Elles sont aussi plus élevées pour les entreprises de 250 salariés ou plus : le taux d’effort publicitaire est 5 fois plus élevé que pour les entreprises de 20 à 249 salariés.
tableauFigure 5 - Ratios des industries alimentaires, de l’industrie de la viande et de ses composantes
Secteur | Taux d’effort publicitaire | Taux de recours à la sous-traitance incorporée* | Taux de sous-traitance incorporée* |
---|---|---|---|
Industrie de la viande | 1,0 | 24,0 | 1,8 |
Transformation et conservation de la viande de boucherie | 0,3 | 23,0 | 1,2 |
Transformation et conservation de la viande de volaille | 0,7 | 24,2 | 4,2 |
Préparation industrielle de produits à base de viande | 2,7 | 26,0 | 1,2 |
Industries alimentaires | 2,6 | 20,0 | 1,2 |
- * Voir définitions.
- Champ : France, hors Mayotte.
- Source : Insee, Ésane 2016.
Sources
Les résultats sont issus de trois sources : les indices de chiffre d’affaires dans l’industrie et la construction ; le dispositif d’élaboration des statistiques annuelles d’entreprises (Ésane) ; les données sur les liaisons financières entre sociétés (Lifi).
Définitions
Les secteurs de l'industrie de la viande étudiés sont les trois sous-classes de la « transformation et conservation de la viande et préparation de produits à base de viande » (groupe 101 de la NAF rév. 2, hors charcuterie et artisanat commercial), ils rassemblent :
- 1011Z : transformation et conservation de la viande de boucherie ;
- 1012Z : transformation et conservation de la viande de volaille ;
- 1013A : préparation industrielle à base de viande.
La charcuterie (1013B) est écartée de l’analyse, car ce secteur relève plutôt de l’artisanat commercial que de la transformation industrielle.
L’industrie de la viande est comparée aux industries alimentaires, soit la division 10 de la NAF rév. 2 hors artisanat commercial (1013B et 1071B, 1071C et 1071D). Les industries agroalimentaires comprennent en plus la fabrication de boissons et de produits à base de tabac.
Le terme d’entreprise est entendu ici au sens juridique d’unité légale, entreprise individuelle ou société, et non au sens économique de la loi de modernisation de l’économie de 2008.
Un groupe de sociétés est une entité économique formée par une société contrôlante et l’ensemble des sociétés qu’elle contrôle.
Contrôler une société, c'est avoir le pouvoir de nommer la majorité des dirigeants.
Le contrôle d'une société A par une société B peut être direct (la société B est directement détentrice de la majorité des droits de vote au conseil d'administration de A) ou indirect (B a le contrôle de sociétés intermédiaires C, voire D, E, etc. à qui elle peut demander de voter d'une même façon au conseil d'administration de A, obtenant ainsi la majorité des droits).
La définition statistique française actuellement en vigueur retient comme critère de contrôle pour définir les contours des groupes la majorité absolue des droits de vote.
On définit :
- le contour restreint ou « noyau dur » du groupe comme l'ensemble des sociétés détenues directement ou indirectement à plus de 50 % par une société mère, tête de groupe ; la société mère n'est détenue majoritairement, ni directement ni indirectement, par aucune autre société. Dans cette définition, les groupes forment des ensembles disjoints deux à deux ;
- le contour élargi d'un groupe comme l'ensemble des sociétés dont le groupe détient des participations, quel que soit le taux de détention ; de ce fait les contours élargis des différents groupes ne forment pas une partition et une société peut appartenir au contour élargi de plusieurs groupes.
L'espace économique où sont implantés les groupes et leurs filiales dépasse le territoire national. Par contre, les enquêtes ou les données administratives recueillent les données économiques des entreprises concernées situées sur le territoire français. Plutôt que de « contour des groupes » et « statistiques sur les groupes et leurs entreprises », il faudrait parler de contour et statistiques de la partie française des groupes.
Le taux de marge est le rapport de l'excédent brut d'exploitation (EBE) à la valeur ajoutée (VA).
Le taux de sous-traitance incorporée est le rapport des montants de sous-traitance incorporée sur le chiffre d’affaires. Le taux de recours à la sous-traitance incorporée est le nombre d’entreprises qui ont eu recours à la sous-traitance incorporée rapporté au nombre d’entreprises du secteur.
Le taux d’effort publicitaire est le rapport des dépenses de publicité sur le chiffre d’affaires.
Pour en savoir plus
Lesdos-Cauhapé C., Besson D., « Les crises sanitaires dans la filière viande – Impact fort à cout terme, plus limité à long terme », Insee Première n° 1166, novembre 2007.
Kohler F., Thibert M., « L’industrie agroalimentaire : un excédent commercial imputable aux vins et spiritueux », Insee Focus n° 83, avril 2017.
Daussin J.-M., Gaudé L., « Ouvrir dans un nouvel ongletLes entreprises agroalimentaires en 2015 », Agreste Chiffres et données n° 187, février 2018.