Insee Analyses Bourgogne-Franche-ComtéBourgogne-Franche-Comté : d’importantes améliorations de la couverture numérique haut débit, le très haut débit comme nouveau défi

Aline Branche-Seigeot, Mélanie Chassard, Insee

La région est très bien fournie en accès numérique mobile haut débit, avec 96 % du territoire couvert. Début 2016, la couverture fixe haut débit est plus faible, mais d’importants investissements ont été effectués depuis, notamment dans les zones les plus densément peuplées. Les investissements se tournent désormais vers le très haut débit, pour lequel la Bourgogne-Franche-Comté se situe nettement en dessous de la moyenne nationale et qui reste concentré dans les grands pôles urbains et le long des grands axes ferroviaires.

Insee Analyses Bourgogne-Franche-Comté
No 21
Paru le :Paru le12/10/2017
Aline Branche-Seigeot, Mélanie Chassard, Insee
Insee Analyses Bourgogne-Franche-Comté No 21- Octobre 2017

L’existence et la qualité des accès à Internet, fixe et mobile, sont fondamentales pour le développement des territoires. Les entreprises peuvent difficilement s’implanter sans une couverture réseau qui leur permette de gérer leur activité, et les individus s’installent d’autant plus volontiers qu’ils peuvent effectuer leurs démarches administratives et achats en ligne ou accéder aux sites d’information et de loisirs. Internet peut faciliter la vie quotidienne et dans une certaine mesure améliorer le lien social et favoriser la lutte contre l’isolement. Cette réalité est davantage tangible dans les zones moins denses, où les accès sont moins nombreux et plus lents. Les territoires doivent ainsi être desservis par les infrastructures nécessaires au transport des données numériques. L’accès mobile à Internet – 2G, 3G, 4G – s’effectue via des antennes relais interconnectées, l’accès fixe – ADSL, câble, fibre, Wi-Fi, Wimax, satellite – via les réseaux de téléphonie classique.

La Bourgogne-Franche-Comté est couverte début 2016 sur 96 % de sa surface par le réseau de téléphonie 3G, qui délivre un accès mobile haut débit (figure 1). Ce taux, légèrement supérieur à celui de la France métropolitaine, est le résultat d’obligations de couverture faites aux opérateurs privés, engagés à apporter pour mi-2017 un service d’accès mobile 3G aux 3 500 communes qui en étaient jusqu’ici privées. Par ailleurs, le Plan de résorption des zones blanches lancé en 2003 a permis, avec deux appels à projets publiés en avril 2016, de compléter le dispositif. Les régions qui restent les moins bien couvertes sont caractérisées par la présence de massifs montagneux qui rendent les antennes relais plus difficiles à installer et moins efficaces (figure 2).

En Bourgogne-Franche-Comté, des efforts importants ont été réalisés depuis plusieurs années pour doter les départements en haut débit mobile, en commençant par les moins bien équipés. En quatre ans, les surfaces couvertes par le réseau 3G dans le Doubs, le Jura et la Saône-et-Loire ont augmenté au moins de 14 % et jusqu’à 18 % dans certains cas. Au premier trimestre 2016, tous les départements de la région ont plus de 90 % de leur surface couverte en haut débit mobile. Quatre zones, parmi les moins densément peuplées, demeurent toutefois sous-équipées : le Châtillonnais, le plateau de Maîche, les environs de Château-Chinon et Morez.

Figure 1Les départements les moins bien couverts par le numérique sont aussi les moins densément peuplésPart surfacique couverte par la 3G et la 4G et part des locaux couvert par un accès fixe à internet selon le débit théorique

Les départements les moins bien couverts par le numérique sont aussi les moins densément peuplés
Couverture mobile (%)Part de la superficie couverte par au moins un opérateur Couverture fixe (%)Part des locaux éligibles selon le débit théorique minimum Densité de population 2014 (hab./ km²)
Haut débit Très haut débit Haut débit Bon haut débit Très haut débit Fibre
3G 4G 3Mbit/s 8Mbit/s 30Mbit/s 100Mbit/s
Côte-d'Or 93 36 72 60 27 14 61
Doubs 92 38 78 66 38 16 102
Haute-Saône 99 25 72 56 24 <1 45
Jura 98 23 69 55 23 6 52
Nièvre 94 25 70 55 15 1 32
Saône-et-Loire 97 45 72 59 20 3 65
Territoire de Belfort 95 55 79 65 32 19 237
Yonne 99 53 70 55 16 <1 45
Bourgogne-Franche-Comté 96 37 72 59 24 7 59
France métropolitaine 95 50 84 71 35 14 104
  • Source : ARCEP et Observatoire France THD, Insee – Recensement de la population 2014

Une couverture très haut débit mobile particulièrement inégale

37 % de la surface de Bourgogne-Franche-Comté est couverte début 2016 par le réseau de téléphonie 4G, qui délivre un accès mobile très haut débit. Ce taux est nettement inférieur à celui de la France métropolitaine (50 %), plus encore si l’on considère l’ouest du pays, du Bordelais aux Hauts-de-France (plus de 80 %) ou encore l’Alsace et le pourtour méditerranéen. La densité de population est supérieure dans ces  régions, ce qui les rend plus propices à attirer les investissements des opérateurs privés. Les lignes LGV sont un autre facteur d’explication : la volonté de la SNCF d’équiper les trains à grande vitesse d’accès Wi-Fi a entraîné l’installation d’antennes 4G tout au long des voies. Dans la région, c’est d’ailleurs le long des LGV Paris-Lyon et Rhin-Rhône que les taux de couverture en 4G sont les meilleurs (figure 2).

Certains départements sont toutefois bien mieux couverts que d’autres comme l’Yonne (53 %), qui a l’avantage de bénéficier des ondes émises par les antennes 4G implantées en région parisienne, et le Territoire de Belfort (55 %), qui est essentiellement urbain et donc plus rentable pour les opérateurs.

Le réseau à très haut débit tarde à se développer en France, en particulier dans les zones rurales, entraînant ce qu’on appelle la fracture numérique. La rentabilité des équipements y est bien moindre qu’en zone urbaine, ce qui n’incite pas les opérateurs privés à investir. Se juxtaposent des zones dites « blanches », encore non desservies par les réseaux numériques, des zones ayant accès à un haut débit de qualité variable et des zones déjà couvertes par le très haut débit.

Figure 2La 3G couvre la quasi-totalité du territoire métropolitain alors que la couverture 4G est plus contrastéePart de la surface communale couverte par au moins un opérateur en 3G et en 4G

  • Source : Arcep

La réduction de la «fracture numérique» est un objectif des pouvoirs publics

Parfois, le très haut débit mobile est accessible sur à peine un quart de la superficie départementale. C’est le cas dans la Nièvre, le Jura et la Haute-Saône. Outre les complications liées au relief pour les deux premiers, ces territoires sont peu densément peuplés. La couverture des seuls centres-bourgs offre un accès 4G à une proportion de la population bien plus grande que ce taux de couverture surfacique ne le laisse présager.

Les opérateurs privés se sont engagés, dans le cadre de la loi du 6 août 2015 pour la croissance, l’activité et l’égalité des chances économiques, à apporter, grâce à un réseau mutualisé et un financement public, une couverture de base dans un certain nombre de centres-bourgs encore non couverts. Ainsi, la couverture mobile par un service de voix des centres-bourgs de l’ancien programme « zones blanches » de 2003 a été achevée fin 2016 et celle des centres-bourgs en haut débit l’a été fin juin 2017, ce qui n’a pu être pris en compte dans l’étude.

Enfin, un investissement massif de 20 milliards d’euros partagé entre les collectivités locales, l’État et les opérateurs privés doit fournir en France d’ici 2022 un accès au très haut débit à tous les logements, à toutes les entreprises et à toutes les administrations. Il s’agit du plan « France Très Haut Débit », lancé en 2013. Le très haut débit doit répondre à la hausse des usages simultanés de terminaux de plus en plus performants – ordinateurs fixes et portables, tablettes, smartphones – et au développement de supports nécessitant davantage de bande passante comme la télévision 3D.

Une couverture fixe haut et très haut débit loin de la moyenne nationale

59 % des locaux de Bourgogne-Franche-Comté sont éligibles à une connexion haut débit fixe de qualité début 2016. Ce taux de couverture est là encore nettement inférieur à celui de la France métropolitaine (71 %) et si l’on considère les autres niveaux de débit, l’écart demeure. Il est d’autant plus marqué que l’on compare la moyenne régionale à celle du quart nord-ouest de la France (figure 3).

Le Doubs et le Territoire de Belfort ont les taux de couverture fixe les plus élevés de la région, quel que soit le niveau de débit. Il s’agit également des départements les plus densément peuplés. À l’inverse, le Jura, la Nièvre et l’Yonne ont la plus faible part de locaux éligibles au haut débit : peu densément peuplés, les opérateurs privés sont moins incités à y investir. Ce sont dès lors les porteurs de réseaux d’initiative publique (RIP)  qui prennent le relais.

Le très haut débit fixe est quant à lui assez peu développé et ne concerne que les grandes agglomérations. 24 % seulement des locaux de Bourgogne-Franche-Comté y sont éligibles et seules quatre villes sont couvertes à 60 % ou plus : Dijon, Besançon, Dole et Montbéliard. La moyenne métropolitaine reste modeste avec 35 % de locaux éligibles.

Figure 3Les territoires les moins denses sont les moins bien couverts en haut débit fixe, le très haut débit fixe reste le privilège des grandes villes métropolitainesPart des locaux éligibles à un débit théorique au moins égal à 8 Mbit/s et 30 Mbit/s

  • Source : Observatoire France TH

L’enjeu d’un meilleur accès au numérique ne concerne pas que les territoires ruraux

Certains bassins de vie ont un taux de couverture inférieur à la moyenne régionale à la fois en haut débit fixe de bonne qualité et en très haut débit mobile (figure 4). Identifier ces territoires et caractériser leurs populations permet d’éclairer les politiques régionales en faveur du numérique. L’analyse des profils de la faible couverture réseau conduit à identifier quatre types de bassins de vie fragiles. Tous ne sont pas ruraux. Il s’agit certes principalement de territoires peu peuplés aux populations âgées ou mixtes dans la partie ouest de la région. À l’est cependant, on trouve davantage de territoires densément peuplés ou dont la population est majoritairement composée d’actifs, d’élèves ou étudiants, caractéristiques d’un environnement urbain ou périurbain.

Figure 4Une grande disparité de profils de population dans les bassins de vie les plus carencésTypologie des bassins de vie qui ont une couverture numérique fragile

  • Note de lecture : dans un premier temps, une classification a été effectuée sur l’ensemble des bassins de vie de la région Bourgogne-Franche-Comté. Les variables utilisées portent sur la situation professionnelle, la structure par âge et la densité de population. Dans un second temps, seuls les bassins de vie retenus comme «fragiles» ont été sélectionnés. Ce sont ceux qui présentent à la fois un taux de couverture fixe haut débit à 8 Mbit/s et un taux de couverture mobile 4G inférieurs à la moyenne régionale.
  • Sources : Arcep, Observatoire France THD et Insee, Recensement de la population 2013

Quels investissements en cours dans la région pour tenir les objectifs ?

Les anciennes régions Bourgogne et Franche-Comté ont respectivement mis en place en 2015 une Scoran (Stratégie de cohérence régionale d’aménagement numérique) en vue d’améliorer les couvertures réseaux fixe et mobile de l’ensemble du territoire et donc de réduire la fracture numérique en luttant contre les zones blanches. Ces stratégies s’articulent avec des SDTan (Schémas directeurs territoriaux d’aménagement numérique) élaborés dans chacun des huit départements. La maîtrise d’ouvrage des travaux est assurée pour partie par les opérateurs privés et pour partie par des acteurs publics, départements ou syndicats mixtes départementaux.

Par ailleurs, en janvier 2016, suite à la fusion des deux régions, six départements de Bourgogne-Franche-Comté – Côte-d’Or, Saône-et-Loire, Nièvre, Yonne, Jura et Doubs – ont créé la SPL-BFCN (Société Publique Locale – Bourgogne Franche-Comté Numérique). Elle prévoit la mise en commun de l’exploitation et de la commercialisation des réseaux de fibres optiques installés par ces six départements, la construction de réseaux publics homogènes ainsi que la venue de fournisseurs d’accès internet locaux et nationaux. Cette mutualisation ouvre la perspective d’une prime dans le cadre de l’exploitation supra-départementale du Plan France Très haut Débit de l’État.

Toutefois, la fibre risquant de ne pas être déployée à court terme dans les zones peu denses, les pouvoirs publics soutiennent l’accès à Internet via d’autres technologies plus marginales, dont la 4G fixe. Cette terminologie désigne l’utilisation du réseau hertzien 4G afin d’apporter Internet dans les foyers et les entreprises, à l’aide de box compatibles pour capter ce type de connexion radio. Cela suppose une couverture par le biais d’antennes, tout comme les réseaux mobiles habituels, mais sur des bandes de fréquences spécifiques destinées à cette utilisation. Il s’agit de répondre aux engagements du Comité interministériel aux ruralités du 14 septembre 2015 qui vise la couverture de 150 000 foyers supplémentaires par le haut débit satellitaire en 2018.

Pour comprendre

Limites de l’étude

Issus de simulation informatique théorique, les débits annoncés peuvent être parfois plus élevés que ceux observés dans la réalité. Le niveau de couverture peut varier selon un certain nombre d’éléments, tels que la typologie du terrain – montagnes, vallées, forêts – la sensibilité du terminal ou encore le fait d’être à l’intérieur d’un bâtiment. Les données relatives à la couverture fixe sont des parts de locaux à usage d’habitation ou professionnel éligibles à un niveau de débit théorique minimum – 3 Mbit/s, 8 Mbit/s, 30 Mbit/s et 100 Mbit/s – pour un type de réseau de communication électronique filaire donné – ADSL, câble et fibre. Les débits réels peuvent là aussi être inférieurs à ceux annoncés par les différents fournisseurs d’accès à Internet dans le cadre de leurs pratiques commerciales du fait de la qualité de la desserte interne du logement, des perturbations électromagnétiques, etc.

D’autre part, les indicateurs retenus ne permettent pas de connaître la part de la population concernée par une bonne couverture mobile et fixe. En effet, si la moitié des locaux sont éligibles à un débit théorique minimum de 8 Mbit/s, cela ne signifie pas que seule la moitié de la population l’est. Comme la couverture vise en priorité les centres-bourgs parce qu’ils sont les plus densément peuplés, elle concerne certainement une part plus importante de la population, même si celle-ci ne peut être connue à partir des données utilisées.

Sources

Cette étude s’appuie sur les données publiques de l’Arcep (Autorité de Régulation des Communications Électroniques et des Postes) pour la couverture mobile et de l’Observatoire France Très Haut Débit pour la couverture fixe. Les données relatives à la couverture mobile sont des taux de surface communale couverte par les réseaux 2G, 3G et 4G déclarés par les quatre principaux opérateurs – Bouygues Telecom, Orange, SFR et Free – au 01/04/2016. Ils reflètent la disponibilité, à l’extérieur des bâtiments, d’accès à un service, telle que les opérateurs l’affichent sur leurs cartes de couverture.

Nomenclature

Nomenclature
Réseau mobile Réseau fixe
Haut débit Très haut débit Haut débit Bon haut débit Très haut débit Fibre
3G 4G 3 Mbit/s 8 Mbit/s 30 Mbit/s 100 Mbit/s
  • Source : Insee

Pour en savoir plus

M. Bertrand, Réseaux mobiles et Internet dans le Jura : bonne couverture 3G mais un haut débit Internet morcelé, Insee Flash n° 37, juillet 2017.

Accès à l’internet fixe : fracture numérique inédite aujourd’hui, factures en hausse demain, UFC-QUE CHOISIR, septembre 2017.