Plus de 20 000 emplois dans la filière forêt-bois en Alsace

Audrey Isel, Philippe Marchet (Insee) Claire Junker, Cédric Luneau (Fibois Alsace)

La forêt alsacienne représente 2 % de la surface forestière nationale et le bois récolté en Alsace 4 % de la production française. D’amont en aval, la filière forêt-bois est structurée en dix segments qui couvrent les différentes activités de la gestion forestière jusqu’aux transformations successives du bois en passant par les activités de soutien (fourniture d'équipements, commerce, transport, bureaux d'études...). En Alsace, elle regroupe 3 100 établissements en 2011, dont 44 % relèvent de la construction en bois. Elle emploie 18 600 salariés, auxquels s’ajoutent quelques 1 900 non-salariés. La construction en bois et l’industrie du papier et du carton sont les plus gros employeurs : ils se partagent la moitié des salariés de la filière.

Principalement constituée d’établissements de très petite taille, la filière forêt-bois est présente sur tout le territoire régional, notamment rural. Certains secteurs géographiques sont spécialisés dans des pans d’activités particuliers : la zone d’emploi de Molsheim-Obernai concentre davantage d’activités de l’amont de la filière, celle de Colmar se distingue par le poids de l’industrie du papier et du carton et celles de Sélestat et de Wissembourg comptent plus de salariés dans la fabrication de meubles.

La filière forêt-bois alsacienne a été fragilisée par la crise économique et financière depuis 2008. Malgré ces difficultés, la construction en bois a continué à se développer, en lien avec la montée en puissance des préoccupations environnementales et notamment l'utilisation accrue de matériaux naturels. Dans les prochaines années, la sylviculture et récolte forestière ainsi que l’industrie du papier et du carton vont devoir faire face à de nombreux départs en retraite. En parallèle, l’essor important de l’utilisation du bois pour l’énergie conduit la filière à relever de nouveaux défis.

L'étude a été réalisée dans le cadre d'un partenariat entre l'Insee Alsace et Fibois Alsace, avec le concours de la Direction Régionale de l'Alimentation, de l'Agriculture et de la Forêt d'Alsace et de la Région Alsace, qui ont en particulier apporté un soutien financier à Fibois Alsace pour cette action.

Audrey Isel, Philippe Marchet (Insee) Claire Junker, Cédric Luneau (Fibois Alsace)
Insee Analyses Alsace No 15- Juin 2015

Avec 3 100 établissements en 2011 qui concourent à la valorisation du bois en tant que matière première, la filière forêt-bois occupe une place importante dans le système productif alsacien. Elle emploie 18 600 salariés, soit 2,8 % de l’emploi salarié de la région. En comptant les quelques 1 900 non-salariés, majoritairement entrepreneurs individuels, la filière forêt-bois fait travailler plus de 20 000 personnes en Alsace en 2011.

La filière s’articule autour de cinq principaux segments : la sylviculture et récolte forestière, le sciage et travail du bois, l’industrie du papier et du carton, la fabrication de meubles et la construction en bois. Ce « cœur » de filière totalise en Alsace 91 % des établissements de la filière et 85 % de ses emplois salariés. La production d’objets divers en bois est également un segment qui prend directement part aux processus de transformation du bois, mais son poids est moindre dans la filière alsacienne. À côté de ces activités, d’autres segments sont liés à la filière et intègrent son périmètre : la production d’équipements pour la récolte forestière ou pour la transformation du bois, le commerce et le transport intra-filière et l’accompagnement de la filière (notamment avec les bureaux d’études). D’amont en aval, la filière forêt-bois est ainsi structurée en dix segments. Un onzième segment, le bois énergie, occupe une place à part et toujours plus importante dans la filière, mais difficilement quantifiable de par sa transversalité

Figure_1Un « cœur » de filière composé de cinq principaux segments

  • Source : Insee, Clap 2011.

Une filière constituée de très nombreux petits établissements

La filière forêt-bois alsacienne se compose majoritairement d’établissements ne déclarant aucun salarié (54 %). Plus globalement, neuf établissements sur dix sont des petites structures de moins de dix salariés. Celles-ci n’emploient qu’un salarié de la filière sur cinq. À l’opposé, dix établissements concentrent autant de salariés. Ils comptent 250 à 600 salariés chacun.

La construction en bois est le premier secteur d’activité de la filière forêt-bois en Alsace, aussi bien en nombre d’établissements que de salariés. Ce segment regroupe les activités de construction de bâtiments en bois, mais aussi les travaux de charpente, de menuiserie en bois et de revêtement des sols et des murs. En 2011, il concentre 44 % des établissements de la filière et emploie 4 490 salariés, soit près du quart des salariés de la filière. En moyenne, la construction en bois ne compte que trois salariés par établissement, soit deux fois moins que ce que l’on observe sur l’ensemble de la filière.

La sylviculture et récolte forestière est le deuxième segment de la filière en nombre d’établissements. Comme les trois quarts de ses 624 structures ne déclarent aucun salarié, ce segment emploie proportionnellement peu de monde : avec 1 280 salariés en 2011, il ne représente que 7 % des salariés de la filière alsacienne. Plus de la moitié d’entre eux travaillent à l’Office national des forêts (ONF). En Alsace, 73 % des forêts sont publiques pour seulement 25 % en France. En se restreignant au champ permettant les comparaisons régionales, l’Alsace se hisse à la 9e place du classement des régions françaises en nombre de salariés travaillant dans la sylviculture et récolte forestière, mais elle est la deuxième région métropolitaine pour le poids de l’ONF dans l’emploi salarié de ce segment, juste derrière l’Île-de-France où se situe son siège.

En 2011, le sciage et travail du bois emploie 2 540 salariés en Alsace (14 % des salariés de la filière), plaçant la région à la 12e place du classement. Au-delà des activités de sciage et de rabotage du bois, ce segment comprend notamment les activités d’imprégnation du bois, de fabrication de panneaux en bois, de parquets, de charpentes et autres menuiseries, d’emballages en bois… La région compte 56 scieries en 2011. Chaque année, près de 700 000 m3 de bois y sont transformés. L’Alsace est la 4e région française en termes de volume de sciage de résineux produit et la 5e en considérant le volume total de sciage. Bien que 16 établissements n’emploient aucun salarié, les scieries font travailler 860 salariés en Alsace. La taille moyenne d’une scierie est de 15 salariés, alors qu’un établissement du secteur du sciage et travail du bois est en moyenne deux fois plus petit.

Avec 4 280 salariés en 2011, l’industrie du papier et du carton est le deuxième employeur de la filière, juste derrière la construction en bois. L’Alsace occupe le 7e rang des régions françaises en nombre de salariés travaillant dans ce segment. En revanche, son poids dans l’emploi salarié total de la région permet à l’Alsace de se hisser au 3e rang du classement, juste derrière le Limousin et la Lorraine, et à égalité avec le Poitou-Charentes. Contrairement à la construction en bois, les salariés de ce secteur industriel se concentrent dans un nombre restreint d’établissements : l’industrie du papier et du carton ne compte que 86 unités de production. Plus du tiers des établissements de la filière forêt-bois régionale dépassant le seuil des 100 salariés relève de l’industrie du papier et du carton. Mais de nombreux établissements artisanaux y côtoient ces grosses unités industrielles.

Enfin, la fabrication de meubles emploie 17 % des salariés de la filière en Alsace, soit 3 130 personnes, et regroupe 13 % de ses établissements. Quatre structures de plus de 250 salariés se démarquent : elles concentrent 57 % de l’emploi salarié total de ce segment.

Un bon maillage du territoire, notamment rural

La filière forêt-bois est présente sur une bonne partie du territoire régional : 77 % des communes alsaciennes accueillent au moins un établissement du secteur. Il existe évidemment des différences infra-régionales. La filière est ainsi moins présente dans la zone d’emploi de Saint-Louis, où seules six communes sur dix bénéficient de l’implantation d’un de ses établissements. À l’opposé, 89 % des communes de la zone d’emploi de Molsheim-Obernai possèdent au moins une unité de la filière sur leur territoire.

La filière forêt-bois contribue particulièrement au maintien de l’activité hors des agglomérations. 37 % de ses établissements sont en effet implantés en milieu rural, alors que seuls 20 % de l’ensemble des établissements de la région le sont. Les emplois salariés basés hors des agglomérations sont trois fois plus nombreux au sein de la filière qu’au sein de l’ensemble de l’économie régionale : 26 % contre 8 %.

Au plus près de la matière première, les établissements de la sylviculture et récolte forestière se situent majoritairement hors des agglomérations (52 %). Les segments du sciage et travail du bois et de la construction en bois ont également une implantation assez rurale, avec plus d’un tiers d’établissements localisés hors des agglomérations. Avec 40 % de ses salariés basés en milieu rural, la construction en bois est d’ailleurs le segment du « cœur » de filière qui en compte le plus.

À l’inverse, dans la fabrication de meubles, seuls 6 % des salariés exercent leur activité hors des agglomérations, bien que 30 % de ses établissements y soient implantés. Enfin, seul un cinquième des établissements de l’industrie du papier et du carton se situent dans une commune rurale, à l’image de l’ensemble de l’économie régionale. En revanche, ce segment affiche une forte proportion d’emplois salariés localisés hors des agglomérations (31 %), car ses deux plus gros établissements employeurs sont implantés en milieu rural.

Des zones d’emploi spécialisées dans certains secteurs d’activité de la filière

La filière forêt-bois est particulièrement présente dans les zones d’emploi de Sélestat, Strasbourg et Mulhouse, qui concentrent à parts égales la moitié de ses salariés. A contrario, elle est plus discrète dans les zones d’emploi de Saint-Louis et Wissembourg, ainsi que dans celle de Saverne.

Au regard de l’emploi salarié total, le poids des salariés de la filière dans l’économie locale distingue par contre les zones d’emploi de Sélestat et de Wissembourg : dans chacun de ces territoires, environ un salarié sur dix travaille dans la filière forêt-bois. La filière contribue également fortement à l’activité des zones d’emploi de Saverne et de Molsheim-Obernai, tandis que son impact à Strasbourg est plus limité (1,2 % de l’emploi salarié total).

D’une zone d’emploi à une autre, la structure de la filière forêt-bois est très différente. La zone d’emploi de Molsheim-Obernai apparaît ainsi plus spécialisée dans les activités de l’amont de la filière. Dans ce territoire, près du tiers des établissements de la filière relèvent de la sylviculture et récolte forestière et 30 % des salariés sont employés dans le sciage et travail du bois, la moitié d’entre eux travaillant dans une scierie.

La zone d’emploi de Colmar est quant à elle largement dominée par l’industrie du papier et du carton : 54 % des salariés appartenant à la filière travaillent dans ce segment. Elle regroupe 31 % des salariés de la région exerçant dans ce secteur d’activité. Les deux tiers d’entre eux sont concentrés dans les deux plus gros établissements du segment implantés à Kunheim, conférant par là une certaine vulnérabilité à cette zone d’emploi en cas de difficultés économiques. Au niveau national, Colmar arrive en 10e position en termes d’effectifs salariés travaillant dans l’industrie du papier et du carton.

Les zones d’emploi de Wissembourg et de Sélestat sont quant à elles particulièrement axées sur la fabrication de meubles. Les salariés de ce segment y constituent respectivement 51 % et 42 % des salariés de la filière. Portée par les deux plus gros établissements employeurs du segment, qui appartiennent au groupe SALM, la zone d’emploi de Sélestat concentre d’ailleurs plus de quatre salariés sur dix travaillant dans la fabrication de meubles en Alsace.

Enfin, les emplois salariés de la construction en bois sont deux fois plus nombreux au sein de la filière dans les zones d’emploi de Saint-Louis et d’Haguenau que dans l’ensemble de la région

Figure_2Une filière très présente dans la zone d'emploi de Sélestat

  • © IGN - Insee 2014
  • Source : Insee, Clap 2011.

36 % des emplois salariés de la filière dépendent de centres de décision extérieurs à la région

Une partie des sièges sociaux des établissements de la filière forêt-bois alsacienne est implantée hors de la région : 9 % des emplois salariés dépendent d’un groupe français, 19 % d’un groupe européen et 8 % d’un groupe étranger situé hors de l’Union européenne.

Dans l’industrie du papier et du carton, l’avenir de moins d’un quart des salariés se décide en Alsace. Les six plus gros établissements employeurs de ce segment sont tous rattachés à des groupes étrangers. Dans la sylviculture et récolte forestière, seuls 46 % des salariés dépendent d’un centre de décision alsacien. La forte présence de l’ONF, dont le siège social est à Paris, explique la dépendance de ce segment à des centres de décision situés en France mais hors de la région. À l’opposé, presque tous les salariés de la construction en bois dépendent d’un centre de décision régional (94 %). Les segments du sciage et travail du bois et de la fabrication de meubles présentent également un fort ancrage régional, puisque 85 et 83 % de leurs salariés travaillent dans un groupe dont le siège social est alsacien.

En se limitant aux seules entreprises dont l'activité s'exerce principalement dans la région, le taux d’exportation de la filière forêt-bois est globalement de 22 %. Le degré d’ouverture à l’international varie sensiblement selon le secteur d’activité. Les entreprises de l’industrie du papier et du carton sont celles qui exportent le plus, avec 38 % de leur chiffre d’affaires réalisé à l’étranger. Avec des taux d’exportation de 19 et 16 %, la fabrication de meubles et le sciage et travail du bois sont également des segments tournés vers l’extérieur. En revanche, la quasi-totalité de la production régionale de la construction en bois et de la sylviculture et récolte forestière est écoulée sur le marché hexagonal.

Figure_3L’industrie du papier et du carton fortement dépendante de centres de décision étrangers

  • Lecture : 64 % des salariés de la filière forêt-bois travaillent dans un établissement dont le centre de décision est situé en Alsace.
  • Source : Insee, Clap et Lifi 2011.

Figure 4La construction en bois, un segment très performant

Les principaux indicateurs financiers de la filière forêt-bois alsacienne en 2011 (en %)
La construction en bois, un segment très performant (Les principaux indicateurs financiers de la filière forêt-bois alsacienne en 2011 (en %))
Sylviculture et récolte forestière Sciage et travail du bois Industrie du papier et du carton Fabrication de meubles Construction en bois Ensemble de la filière
Organisation et débouchés de la production
Taux d'exportation1 2,1 16,1 38,3 18,5 0,8 21,8
Taux de valeur ajoutée2 24,3 25,0 25,4 26,6 37,8 28,5
Intensité capitalistique (en k€/salarié)3 170 119 179 93 44 101
Partage de la valeur ajoutée au coût des facteurs4
Part des frais de personnel 65,1 79,3 66 70,3 83,7 74,8
Taux de marge5 34,9 20,7 34 29,7 16,3 25,2
Ratio de rentabilité
Rentabilité économique6 13,9 6,6 11,4 19,4 16,7 12,2
  • 1 Part du chiffre d’affaires à l’export dans le chiffre d’affaires total.
  • 2 Part de la valeur ajoutée dans le chiffre d’affaires.
  • 3 Rapport entre les immobilisations corporelles brutes et les effectifs salariés en équivalent temps plein.
  • 4 Valeur ajoutée de laquelle on déduit les impôts sur la production et à laquelle on ajoute les subventions d’exploitation.
  • 5 Part de l’excédent brut d’exploitation dans la valeur ajoutée au coût des facteurs.
  • 6 Part de l’excédent brut d’exploitation dans le capital d’exploitation.
  • Champ : Entreprises mono et quasi-mono régionales de la filière forêt-bois en Alsace.
  • Source : Insee, Clap et Fare 2011.

Une rentabilité économique plus élevée dans la fabrication de meubles et plus faible dans le sciage et travail du bois

En 2011, le taux de valeur ajoutée de la filière forêt-bois alsacienne est de 29 % en moyenne. La construction en bois est le segment du « cœur » de filière qui génère de loin le plus de richesse en valeur relative : 38 %, contre 24 à 27 % pour les autres segments.

L’intensité capitalistique, qui rapporte les immobilisations corporelles (construction, installations, machines et matériels) aux salariés, est de 101 000 € par salarié dans la filière forêt-bois. Mais cette moyenne masque de fortes disparités d’un secteur d’activité à un autre. Elle est ainsi quatre fois plus forte dans l’industrie du papier et du carton que dans la construction en bois (179 000 € par salarié contre 44 000 €).

La richesse créée par une entreprise sert à rémunérer ses salariés, à financer l’investissement et à rémunérer les apporteurs de capitaux. Le taux de marge est la part de la richesse utilisée pour l’investissement et la rémunération des apporteurs de capitaux. Dans la filière forêt-bois alsacienne, les trois quarts de la valeur ajoutée produite sont consacrés aux frais de personnel. Son taux de marge est donc de 25 %. La rentabilité économique de la filière s’apprécie quant à elle relativement au capital engagé : elle s’élève à 12 % en Alsace en 2011.

La filière affiche évidemment des performances économiques différenciées selon les segments. C’est la fabrication de meubles qui s’avère être le secteur le plus rentable en 2011 (19 %), malgré la concurrence accrue à laquelle cette activité est confrontée. Le sciage et travail du bois a la plus mauvaise rentabilité économique, en lien avec une part élevée des frais de personnel dans la valeur ajoutée et des immobilisations corporelles relativement importantes.

Malgré de nombreux salariés à rémunérer, la construction en bois dispose d’une bonne rentabilité économique (17 %), due au peu de capital à rentabiliser. À l’inverse, alors que les taux de marge de la sylviculture et récolte forestière et de l’industrie du papier et du carton sont les plus élevés du « cœur » de filière, leurs rentabilités économiques se révèlent assez moyennes. Dans l’industrie du papier et du carton, les importantes immobilisations corporelles nécessaires à la production pèsent sur sa rentabilité. Dans la sylviculture et récolte forestière, la faible part des frais de personnel dans la valeur ajoutée ne se traduit pas dans la rentabilité économique du fait du niveau élevé de l’intensité capitalistique.

Une filière avant tout masculine et ouvrière

Bien moins féminisée que l’ensemble de l’économie régionale, la filière forêt-bois alsacienne compte tout de même 21 % de femmes parmi ses salariés en 2011. Elles sont presque deux fois moins nombreuses dans la construction en bois et ne représentent que 15 % des salariés du sciage et travail du bois (à peine 10 % dans les scieries). En revanche, un tiers des salariés de l’industrie du papier et du carton sont des femmes. La sylviculture et récolte forestière apparaît également comme un segment relativement féminisé dans la région (24 %).

En Alsace, six salariés de la filière forêt-bois sur dix sont des ouvriers. Cette proportion s'élève à 73 % dans la construction en bois et à 69 % dans le sciage et travail du bois. Par conséquent, ces segments affichent un plus faible salaire horaire net moyen que celui de l’ensemble de la filière : 11,80 € contre 13,20 €. Prise dans son ensemble, la sylviculture et récolte forestière présente la plus faible part d’ouvriers (43 %), mais elle en compte autant que toute la filière lorsqu’on exclut les salariés de l’ONF. Cet établissement public regroupe quatre fois plus de salariés exerçant une profession intermédiaire que l’ensemble de la filière (59 % contre 15 %). Au sein du « cœur » de filière, c’est dans l’industrie du papier et du carton que le salaire horaire est le plus élevé (15,10 €), en lien avec une plus forte proportion de cadres (16 % contre 10 % dans l’ensemble de la filière).

De nombreux départs à la retraite à venir dans la sylviculture et récolte forestière et dans l’industrie du papier et du carton

En 2011, 21 % des postes de la filière forêt-bois sont occupés par des salariés de plus de 50 ans et 28 % par des salariés de 30 ans ou moins, garantissant un renouvellement des générations et une transmission des savoirs. Mais la situation est très différente selon le secteur d’activité considéré. La sylviculture et récolte forestière ainsi que l’industrie du papier et du carton sont particulièrement confrontés au renouvellement de leur main d’œuvre : respectivement 34 % et 29 % de leurs salariés ont plus de 50 ans en 2011 et seulement 20 % et 13 % d’entre eux ont 30 ans ou moins. À l’inverse, le segment de la construction en bois est jeune et est en plein développement. Avec 45 % de salariés de 30 ans ou moins, il compte 3 fois plus de jeunes que de personnes de plus de 50 ans.

Figure_5La construction en bois, un secteur jeune en plein développement

  • Source : Insee, Clap et Dads 2011.

Évolution récente de la filière forêt-bois alsacienne et conséquences de la crise économique et financière

Entre 2008 et 2011, le poids de la filière forêt-bois alsacienne dans l’économie régionale a baissé. Alors qu’en 2008 les établissements de la filière représentaient encore 2,5 % de l’ensemble des établissements régionaux, ils n’en constituent plus que 2,1 % en 2011. En 3 ans, la filière forêt-bois a perdu 2,5 % de ses établissements, quand l’économie régionale et nationale en a gagné près de 17 %, dopée par le succès du régime de l’auto-entrepreneur entré en vigueur au 1er janvier 2009 (plus d’une création d’entreprise sur deux relève de ce nouveau régime chaque année). L’évolution de la filière forêt-bois alsacienne est atypique : en se restreignant au champ permettant les comparaisons régionales, aucune autre région n’a vu le nombre d’établissements de la filière baisser (l’évolution globale étant de + 15 % en France). Les réorganisations et nombreux regroupements de communes forestières réalisés en Alsace sur cette période expliquent l’essentiel de cette évolution et l’écart observé par rapport aux autres régions (- 17,8 % d’établissements dans la sylviculture et récolte forestière). La fabrication de meubles contribue également à la baisse globale du nombre d’établissements de la filière, ses petits établissements artisanaux ayant été confrontés à une forte concurrence en cette période de crise économique. Avec 56 établissements, le nombre de scieries est resté stable entre 2008 et 2011. Mais pris dans son ensemble, le segment du sciage et travail du bois a progressé en nombre d’établissements, tout comme celui de la construction en bois.

En termes d’emplois salariés, la filière forêt-bois alsacienne a nettement moins bien résisté à la crise économique et financière que l’ensemble de l’économie régionale : - 5,1 % contre - 1,9 % entre 2008 et 2011. La fabrication de meubles a perdu près de trois salariés sur dix sur cette période. La construction en bois est pour sa part le seul segment du « cœur » de filière à connaître une progression de ses effectifs salariés.

En se restreignant aux 2 346 établissements présents en 2008 et 2011 (qui représentent 73,4 % des établissements de 2008 et 75,3 % de ceux de 2011), la filière forêt-bois alsacienne a perdu 8,6 % d’emplois salariés. Sur ce champ constant d’établissements, la baisse du nombre de salariés apparaît plus importante dans l’industrie du papier et du carton (- 17,2 %) et dans la sylviculture et récolte forestière (- 11,7 %). Elle est en revanche moins marquée dans la fabrication de meubles (- 8,9 %). La construction en bois présente également des effectifs salariés en baisse (- 3,5 %), tandis que le sciage et travail du bois fonctionne avec le même niveau d'effectifs salariés.

Figure 6Recul de la filière forêt-bois alsacienne entre 2008 et 2011

Éléments de cadrage de la filière forêt-bois alsacienne en 2008 et 2011
Recul de la filière forêt-bois alsacienne entre 2008 et 2011 (Éléments de cadrage de la filière forêt-bois alsacienne en 2008 et 2011)
2008 2011 Évolution 2008-2011 (en %)
Établissements Ensemble 3 195 3 116 -2,5
Poids parmi l'ensemble des établissements de la région 2,5% 2,1% ns
Sylviculture et récolte forestière 759 624 -17,8
Sciage et travail du bois 311 350 12,5
Industrie du papier et du carton 88 86 -2,3
Fabrication de meubles 455 398 -12,5
Construction en bois 1 278 1 374 7,5
Effectifs salariés Ensemble 19 609 18 602 -5,1
Poids parmi l'ensemble des emplois salariés de la région 2,9% 2,8% ns
Sylviculture et récolte forestière 1 355 1 279 -5,6
Sciage et travail du bois 2 569 2 539 -1,2
Industrie du papier et du carton 4 483 4 283 -4,5
Fabrication de meubles 4 354 3 132 -28,1
Construction en bois 4 393 4 490 2,2
  • ns : non significatif
  • Source : Insee, Clap 2011.

Une forêt abondante et productive

Avec une forêt qui couvre 38 % de sa surface, soit près de 317 000 hectares, l’Alsace fait partie des régions les plus boisées de France. Sa forêt représente près de 2 % de la surface forestière nationale. Elle est la plus productive de France : son volume à l’hectare est de 257 m³/ha, contre 161 m³/ha à l’échelle française. Son volume sur pied est d’environ 80 millions de m³, ce qui correspond à 3 % du volume total de la forêt française.

La forêt alsacienne compte plus de 40 espèces forestières différentes. Les feuillus, tels que le hêtre ou le chêne, couvrent 64 % de la surface forestière, majoritairement en plaine. Le tiers restant est composé de résineux (sapin, épicéa, pin et douglas principalement). En termes de volume de bois, les feuillus ne représentent toutefois que 53 % du patrimoine forestier alsacien, contre 47 % pour les résineux. Chaque année, environ 1,3 million de m3 de bois est récolté dans la région.

La propriété forestière alsacienne est atypique, puisque 73 % des forêts sont publiques : 23 % appartiennent à l’Etat et 50 % à près de 650 collectivités. Les 27 % restants sont détenus par près de 85 000 propriétaires privés. À l’échelle nationale, les forêts sont aux trois quarts privées. Enfin, l’Alsace est la 1ère région française en termes de taux de certification : 74 % de ses forêts sont certifiées par le label international de gestion durable PEFC.

Le bois énergie en plein essor

Le bois énergie est un segment transversal à la filière forêt-bois. Il comprend des activités telles que la fabrication et le commerce de combustibles bois (sous forme de bûches, de plaquettes et de granulés), la fabrication et la vente d’appareils de chauffage au bois ou encore le ramonage. Il est en plein essor ces dernières années, à la faveur du développement des énergies renouvelables.

En 2006, près de 169 000 foyers étaient déjà équipés d’un chauffage au bois en Alsace. Avec une consommation globale de bois énergie qui atteint 1,3 million de tonnes en 2012 dans la région, ce secteur affiche une progression de 30 % par rapport à 2008. C’est principalement la consommation de plaquettes, à travers de grands projets collectifs, qui a augmenté pendant ces quatre années. Toutefois, le bois bûche reste encore le combustible bois le plus consommé en Alsace, avant la plaquette et le granulé.

On estime que 197 établissements relèvent du bois énergie en Alsace en 2011, soit une progression de plus de 30 % par rapport à 2008 (une partie de cette évolution étant sans doute liée à leur meilleure identification). En 2011, le bois énergie emploie près de 1 000 salariés. Les effectifs des établissements déjà présents en 2008 sont restés stables sur la période.

Méthodologie

Le périmètre de la filière forêt-bois alsacienne a été obtenu en deux temps. Une première sélection d’établissements a été réalisée au niveau national à partir de leur code d’activité principale et d’enquêtes complémentaires (l’enquête annuelle de production (EAP) de l’Insee et les enquêtes annuelles de branche du ministère de l’Agriculture), avec une indication sur leur probabilité d’appartenance à la filière. Par défaut, seuls les établissements ayant une probabilité importante d’appartenir à la filière - le « noyau » de la filière - sont retenus. Dans un deuxième temps, la liste de l’ensemble des établissements alsaciens pouvant potentiellement appartenir à la filière a été transmise à Fibois Alsace pour expertise. S’appuyant sur sa connaissance du secteur, Fibois Alsace a également ajouté d’autres établissements afin de compléter le périmètre. Ce travail d’expertise fine n’ayant pu être réalisé qu’au niveau régional, les comparaisons entre régions ne sont faites dans cette étude que sur le périmètre restreint du « noyau » de la filière. Seuls 40 % des établissements du périmètre final de la filière forêt-bois alsacienne appartiennent au « noyau ». Trois segments du « cœur » de filière y sont suffisamment bien représentés pour permettre des comparaisons régionales : la sylviculture et récolte forestière, le sciage et travail du bois et l’industrie du papier et du carton. En revanche, le « noyau » ne contient qu’un établissement sur six de la fabrication de meubles et de la construction en bois, leurs codes d’activité ne permettant a priori pas de garantir leur intégration dans la filière car ils ne distinguent pas la matière première utilisée.

Par ailleurs, l’étude des données comptables et financières de la filière ne peut se faire, par nature, qu’à l’échelle des entreprises, et non à celle plus fine des établissements. Le champ est restreint aux entreprises mono et quasi-mono régionales, c’est-à-dire aux entreprises mono-établissement ayant leur siège en Alsace et aux entreprises pluri-établissements ayant au moins 80 % de leurs salariés dans la région (ou 80 % de leurs établissements si elles n’ont aucun salarié). L’Alsace compte ainsi 2 358 entreprises dans la filière forêt-bois, regroupant 2 462 établissements. Cette nécessaire adaptation du champ pour cet aspect de l’étude conduit ainsi à exclure un cinquième des établissements de la filière et près d’un quart de ses effectifs salariés, principalement dans la sylviculture et récolte forestière et dans l’industrie du papier et du carton.

Figure 7Part des établissements et des effectifs salariés ayant été exclus du champ de l’analyse des indicateurs financiers de la filière

En %
Part des établissements et des effectifs salariés ayant été exclus du champ de l’analyse des indicateurs financiers de la filière (En %)
Établissements Effectifs salariés
Sylviculture et récolte forestière 63 83
Sciage et travail du bois 14 7
Industrie du papier et du carton 27 37
Fabrication de meubles 8 10
Construction en bois 8 5
Ensemble de la filière forêt-bois 21 24
  • Source : Insee, Clap et Fare 2011.

Pour en savoir plus

La filière forêt-bois : panorama des secteurs d'activité, Chiffres pour l'Alsace n° 1, Insee Alsace, février 2009.

Ouvrir dans un nouvel ongletMémento Statistique Agricole, Filière Forêt-Bois, Agreste Alsace, octobre 2014.

Résultats d'inventaire forestier, Tome région administrative, Alsace. Les résultats des campagnes d'inventaire 2008 à 2012, IGN.

Ouvrir dans un nouvel ongletActualisation des données alsaciennes du Schéma Régional Climat Air Énergie - Volet biomasse bois, Fibois Alsace, novembre 2013.

Ouvrir dans un nouvel ongletSuivi de l'évolution du bois énergie sur les régions du grand Nord-Est de la France, ADIB, APROVALBOIS, Fibois Alsace, GIPEBLOR, Valeur Bois, Nord Picardie Bois, août 2014.