Insee Première365 000 Domiens vivent en métropole

Sarah Abdouni et Édouard Fabre, direction régionale de La Réunion-Mayotte

En 2008, 364 800 personnes nées dans un département d’outre-mer vivent en France métropolitaine. C’est un Antillais sur quatre et un Réunionnais sur sept ; les Antillais plutôt dans l’agglomération parisienne, les Réunionnais dans le sud de la France.

Leur taux d’emploi et leur niveau de formation sont comparables à ceux des autres métropolitains. Les Domiennes travaillent essentiellement dans la fonction publique, territoriale ou hospitalière, les Domiens dans les secteurs des transports, de la logistique ou du bâtiment.

Sarah Abdouni et Édouard Fabre, direction régionale de La Réunion-Mayotte
Insee Première No 1389- Février 2012

Un Antillais sur quatre et un Réunionnais sur sept vivent en métropole

En 2008, 364 800 personnes nées dans un département d’outre-mer (Guadeloupe, Martinique, Guyane et La Réunion)  vivent en France métropolitaine. Elles sont deux fois plus nombreuses qu’en 1975. À l’inverse des schémas traditionnels de migration selon lesquels les hommes migrent davantage, les femmes natives des DOM sont aussi nombreuses à migrer vers la métropole que les hommes.

Avec 117 000 Martiniquais et 115 400 Guadeloupéens installés sur le territoire métropolitain, les Antillais sont les plus nombreux. Un Antillais sur quatre réside ainsi en métropole, pour seulement un Réunionnais sur sept (soit 108 000 personnes). Ces ratios sont constants depuis le début des années 1980. Les Guyanais sont, quant à eux, peu nombreux à migrer : 24 400 personnes vivent dans l’Hexagone (graphique 1). Toutefois, la croissance récente de la population en Guyane pourrait accélérer ces migrations.

Graphique 1 Les migrations des Domiens vers la métropole repartent à la hausse

  • Source : Insee, recensements de la population.

En métropole, les Domiens vivent davantage en couple que dans leurs départements d’origine

Le profil des ménages des natifs domiens qui résident en France métropolitaine est comparable à celui des métropolitains (tableau 1). Les familles monoparentales sont moins fréquentes en métropole que dans les DOM (14 % contre 22 %) mais ce sont elles qui rencontrent le plus de difficultés liées à une migration : précarité financière, isolement et absence ou faiblesse du soutien familial notamment.

Les natifs des DOM vivent plus souvent en couple dans l’Hexagone. En particulier, les deux tiers des Réunionnais y vivent en couple, souvent avec enfant(s) (43 % des ménages réunionnais). C’est trois points de plus qu’à La Réunion, où le niveau est déjà particulièrement élevé.

Les Guyanais se distinguent des autres Domiens de métropole : un quart d’entre eux ont entre 18 et 25 ans et donc vivent plus souvent seuls. Au total, un Guyanais sur trois vit seul en métropole.

Tableau 1Composition des ménages de Domiens en métropole et dans les DOM

Composition des ménages de Domiens en métropole et dans les DOM
Lieu de résidence Guadeloupéens Martiniquais Guyanais Réunionnais France métropolitaine
Métropole Guadeloupe Métropole Martinique Métropole Guyane Métropole La Réunion
Couple sans enfant 16,0 15,7 18,3 15,7 19,3 12,6 22,7 15,9 27,1
Couple avec enfant(s) 34,9 27,9 34,0 26,5 29,1 34,8 43,2 40,0 28,6
Famille monoparentale 17,4 23,5 16,6 24,8 14,4 24,7 9,5 20,0 8,4
Personne seule 27,7 29,4 27,8 29,4 32,6 20,5 22,1 20,9 33,3
Ménage complexe 4,0 3,6 3,3 3,5 4,7 7,5 2,5 3,2 2,6
Ensemble 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0 100,0
  • Lecture : 16,0 % des ménages guadeloupéens qui vivent en métropole sont des couples sans enfant ; cette proportion est de 15,7 % en Guadeloupe.
  • Source : Insee, recensement de la population 2007.

Le taux d’emploi des natifs des DOM semblable à celui des autres métropolitains

Les Domiens de métropole sont plus diplômés que les résidents des DOM. La situation économique en métropole étant plus favorable que dans les DOM, les Domiens accèdent plus facilement à un emploi en métropole. Leur niveau de diplôme est comparable à celui des autres métropolitains, leur aussi (tableau 2) : à niveau de formation équivalent, les natifs des DOM sont dans les mêmes conditions d’activité et d’emploi. Au total, 216 000 natifs des DOM ont un emploi dans l’Hexagone en 2008. Par ailleurs, 28 000 Domiens âgés de 15 ans et plus y poursuivent des études : 9 000 Réunionnais, 8 000 Guadeloupéens, 8 000 Martiniquais et 3 000 Guyanais.

La proportion d’Antillaises ayant un emploi est supérieur de 10 points à celle des Réunionnaises et des métropolitaines. Ce fort taux d’emploi peut être mis en relation avec la monoparentalité plus répandue chez les Antillaises que chez les métropolitaines ou les Réunionnaises. Ces dernières sont, d’ailleurs, plus souvent inactives : 10 % d’entre elles sont femmes au foyer, contre 3 % des Antillaises. La faible activité féminine est une caractéristique forte de la société réunionnaise.

Le taux d’emploi corrigé des effets démographiques () permet de comparer chaque DOM avec la métropole. Les natifs des DOM qui vivent en métropole étant plus nombreux aux classes d’âges les plus actives (30 - 40 ans), leur taux d’emploi est plus élevé : 70,2 % contre 63,8, % pour les métropolitains Toutefois, dans chaque classe d’âges, Domiens et métropolitains sont autant en emploi. Le taux d’emploi corrigé des effets démographiques des Domiens est quasi équivalent à celui des métropolitains (respectivement 63,3 % et 62,3 %).

Tableau 2Taux d'emploi des Domiens, âgés de 15 à 64 ans, résidant en métropole

Taux d'emploi des Domiens, âgés de 15 à 64 ans, résidant en métropole
  Guadeloupe Martinique Guyane La Réunion DOM France métropolitaine
Hommes 75,3 74,5 62,5 73,9 73,9 68,1
Femmes 71,5 69,7 56,0 60,2 66,6 59,5
Ensemble 73,4 72,1 59,1 66,7 70,2 63,8
Ensemble (Taux corrigé des effets démographiques) 64,7 64,2 61,7 60,3 63,3 62,3
  • Lecture: 75,3 % des Guadeloupéen(es) ont un emploi. Corrigés des effets démographiques, leur taux d'emploi est de 64,7 % contre 62,3 % pour les métropoloitains.
  • Les taux d'emploi corrigés des effets démographiques permettent les comparaisons entre chaque DOM et la métropole. Les Domiens vivant en métrople sont plus nombreux aux classes d'âge les plus actives ce qui biaise la moyenne globale. Ils paraissent globalement plus en emploi alors que cela n'est pas le cas. Au même âge, Domiens et métropolitains sont tout autant en emploi. Le taux d'emploi corrigé des effets démographiques des Domiens est équivalent à celui des métropolitains (respectivement 63,3 et 62,3 %).
  • Source: Insee, recensement de la population 2008.

La moitié des natives des DOM travaillent dans la fonction publique

Les hommes et femmes natifs des DOM exercent des métiers différents. La moitié des Domiennes qui travaillent sont salariées de l’État, d’une collectivité publique ou de la fonction publique hospitalière. Elles sont plus nombreuses que les hommes à être titulaires d’un diplôme équivalent ou supérieur au baccalauréat, ce qui leur permet d’accéder aux emplois de la fonction publique. Elles sont le plus souvent aides-soignantes, infirmières et agents d’entretien des hôpitaux, ou agents administratifs de catégorie B et C de l’administration.

Un tiers des Domiens ont un CAP ou un BEP. Ainsi, 39 % des Domiens qui ont un emploi en métropole sont ouvriers, pour 35 % des métropolitains. Ils sont avant tout ouvriers qualifiés dans les secteurs des transports, de la logistique et du bâtiment.

Les Antillais vivent en région parisienne, les Réunionnais préfèrent le sud

Deux tiers des Antillais de métropole sont installés en Île-de-France, soit 153 000 personnes (carte). Historiquement, la migration des Antillais répondait avant tout à un besoin en personnel des administrations et des services de santé, très implantés en région parisienne. À cette demande forte de main-d’œuvre a répondu une offre large de logements sociaux (encadré) : dans la région parisienne, la moitié des ménages antillais vivent en HLM. Quant aux Guyanais, la moitié d’entre eux sont installés dans la région parisienne. Mais ils ne délaissent pas pour autant les régions du Sud puisque un Guyanais sur cinq vit dans une des quatre régions du sud de la France

Les Réunionnais vivent très majoritairement en province (72 %). Leur implantation est plus diversifiée sur l’ensemble du territoire. Un tiers des Réunionnais vivent dans les régions du sud de la France, en Aquitaine, Midi-Pyrénées, Languedoc-Roussillon, Paca ou Rhône-Alpes. Dans ces régions, le coût des logements est souvent moins élevé qu’en Île-de-France, ce qui facilite l’accession à la propriété. Quatre Réunionnais sur dix sont ainsi propriétaires de leur logement. C’est plus que les Antillais (30 %) mais cela reste inférieur aux autres métropolitains (57 % de propriétaires).

Par ailleurs, les Domiens vivent dans des logements plus petits que les autres métropolitains alors que leurs familles sont plus nombreuses. Aussi, un logement de Domien sur cinq est-il . Les Antillais sont particulièrement touchés : un ménage antillais sur quatre vit dans un logement surpeuplé pour un Réunionnais sur six. Cette différence est liée à leurs localisations respectives.

CarteTaux de Domiens pour 10 000 habitants

  • Source : Insee, recensement de la population 2008.

12 700 Mahorais en France métropolitaine

L’île de Mayotte est devenue le cinquième département d’outre-mer le 31 mars 2011. En 2008, Mayotte avait le statut de collectivité d’outre-mer. À cette date, 12 700 Mahorais vivent en France métropolitaine. Parmi eux, 2 700 sont arrivés moins de cinq ans auparavant. La population mahoraise qui réside dans l’Hexagone est très jeune, à l’image de Mayotte. Ainsi, huit Mahorais sur dix ont moins de 30 ans et un Mahorais sur trois a moins de 15 ans. Ceux qui sont arrivés récemment sur le territoire métropolitain sont encore plus jeunes, puisque 90 % ont moins de 30 ans.

Les Mahorais résident avant tout dans le sud de la France. En tête, la région Provence-Alpes-Côte d’Azur accueille 17 % des Mahorais qui vivent en métropole.

Un tiers des Mahorais de métropole vivent seuls ; 20 % sont des familles monoparentales (deux fois plus que dans la population métropolitaine) et 39 % vivent en couple (56 % dans l’ensemble des habitants de la métropole).

Les ménages mahorais sont locataires de leur logement (95 %). En dépit de leur faible présence en Île-de-France, près de la moitié d’entre eux sont en situation de surpeuplement. C’est cinq fois plus que pour l’ensemble de la population métropolitaine.

Les politiques d’accompagnement des migrants

Dès les années 1950, les Antillais sont venus s’installer en nombre sur le territoire métropolitain. Au lendemain de la guerre, le besoin de main-d’œuvre fait écho au déclin de l’économie de plantation, à l’incapacité du marché du travail à absorber la population active et à la forte pression démographique aux Antilles. En 1962, 38 000 Antillais vivent dans l’Hexagone, soit 2,5 fois plus qu’en 1954.

Au début des années 1960, l’État institutionnalise les migrations des DOM vers la métropole. En 1963, est créé le Bureau pour le développement des migrations dans les départements d’outre-mer (Bumidom). Il a pour mission d’organiser l’émigration des habitants des DOM vers la France métropolitaine et leur insertion professionnelle. Il organise pendant vingt ans l’arrivée de nouveaux postiers, douaniers, agents RATP, aides-soignantes et ouvriers peu qualifiés. C’est à cette époque que l’émigration des Réunionnais débute et en 1965, est créé le Comité national d’accueil des Réunionnais en mobilité (Cnarm) qui a pour mission d’aider les Réunionnais à trouver un emploi en métropole. En 1967, une ligne aérienne directe reliant La Réunion et la métropole facilite leur venue. Jusque-là les migrants utilisaient le bateau et débarquaient au port de Marseille.

Durant la décennie 1970, les actions visant à favoriser l’arrivée en métropole des familles de migrants se multiplient. C’est durant cette décennie que les migrations domiennes sont les plus nombreuses. En 1975, 157 000 Domiens résident en métropole, c’est presque deux fois plus qu’en 1968.

Au cours de la décennie 1980, l’émigration de masse ralentit, freinée par la dégradation du marché du travail liée aux deux crises pétrolières. Les objectifs des politiques migratoires connaissent alors un tournant. En 1982, l’Agence nationale pour l’insertion et la protection des travailleurs d’outre-mer (ANT) remplace le Bumidom. Il ne s’agit plus de faire venir des travailleurs en masse. Ses missions se recentrent sur les ressortissants d’outre-mer déjà installés en France métropolitaine. L’objectif est d’améliorer leur intégration sociale et de les encourager à retourner dans leur département d’origine. Au cours des dix dernières années, l’émigration est repartie à la hausse. Entre 1999 et 2008, la population domienne en métropole a augmenté de 13 % (contre seulement 2 % entre 1990 et 1999). En 2002, le passeport mobilité vers la métropole pour les études, la formation et l’insertion professionnelle pour les jeunes résidants des DOM est créé. En 2003, la continuité territoriale est élargie aux DOM, elle est destinée à faciliter les déplacements des résidents des DOM vers la métropole. La loi du 27 mai 2009 pour le développement économique des outre-mer (Lodeom) institutionnalise et organise ces différents types d’aides. La mise en œuvre de ces aides est assurée par les collectivités territoriales des DOM et l’agence de l’outre-mer pour la mobilité (Ladom) et le Cnarm à la Réunion. Ladom remplace l’ANT depuis 2010.

Définitions

Taux d’emploi : Le taux d’emploi d’une classe d’individus est calculé en rapportant le nombre d’individus de la classe ayant un emploi au nombre total d’individus dans la classe. Il peut être calculé sur l’ensemble de la population d’un pays, mais on se limite le plus souvent à la population en âge de travailler (généralement définie, en comparaison internationale, comme les personnes âgées de 15 à 64 ans), ou à une sous-catégorie de la population en âge de travailler (femmes de 25 à 29 ans par exemple).

Taux d’emploi sous-jacent : taux d’emploi corrigé des effets démographiques, il est égal à la moyenne arithmétique (non pondérée par la taille des différentes générations) des taux d’emploi par âge détaillé. C’est le taux d’emploi qu’aurait connu une classe d’âges si chaque génération qui la compose était de taille identique ; les effets de composition démographique sont ainsi neutralisés.

Surpeuplement : chaque logement devrait disposer d’un nombre de pièces qui permette de préserver l’intimité de chacun. La norme Insee prévoit une pièce par couple et/ou par adulte, une pièce pour chaque enfant de plus de sept ans dans des fratries de sexe différent et une pièce pour deux enfants plus petits. La différence entre le nombre de pièces réel et la norme Insee ainsi calculée permet d’attribuer un indice de peuplement.