Insee PremièreUn premier enfant à 28 ans

Emma Davie, division Enquêtes et études démographiques, Insee

En 2010, en France métropolitaine, les femmes ont en moyenne leur premier enfant à 28 ans, soit quatre ans plus tard qu’à la fin des années 1960. Le report de l’âge à l’accouchement ralentit toutefois depuis une dizaine d’années. Les femmes sont également plus âgées à la naissance d’un deuxième ou troisième enfant. Au total, l’âge moyen des mères à l’accouchement quel que soit le rang de naissance de l’enfant atteint 30 ans en 2010.

Plus le diplôme de la femme est élevé, plus le premier enfant arrive tard. Cela explique en partie que les femmes deviennent mères plus tard dans le sud de la France ainsi qu’en Île-de-France, où les parts des diplômées sont les plus élevées. Cela contribue aussi à expliquer que les femmes immigrées nées en Turquie ont leur premier enfant près de 4 ans plus tôt que la moyenne, et celles nées en Afrique 9 mois plus tôt.

En Europe centrale et orientale, les femmes donnent naissance à leur premier enfant plus tôt qu’en France, avant 27 ans. En Italie ou en Espagne, elles ont en revanche leur premier enfant après 29 ans.

Emma Davie, division Enquêtes et études démographiques, Insee
Insee Première No 1419- Octobre 2012

L’âge moyen au premier enfant continue d’augmenter, mais sa croissance ralentit

En France métropolitaine, l’ auquel les femmes accouchent de leur premier enfant augmente depuis le milieu des années 1970 et atteint 28,1 ans en 2010 (graphique 1). C’est quatre ans plus tard qu’en 1967, où les femmes devenaient mères à 24,2 ans.

Des années 1960 au milieu des années 1970, l’âge au premier bébé a d’abord légèrement diminué. Sa croissance a ensuite été rapide jusqu’à la fin des années 1990, favorisée par le développement de la contraception et l’accès à l’interruption volontaire de grossesse : ces évolutions ont permis aux femmes de mieux maîtriser le calendrier des naissances de leurs enfants. La hausse s’est ensuite poursuivie mais à un rythme ralenti. Plusieurs facteurs peuvent expliquer que l’arrivée du premier enfant continue d’être plus tardive. Dans un premier temps, la généralisation des études, et notamment des études supérieures pour les femmes, joue sans doute un rôle important. La place croissante des femmes sur le marché du travail et leur souci d’avoir un travail stable avant de fonder une famille entre certainement également en jeu, de même que la volonté croissante de vivre un certain temps à deux.

Graphique 1 Évolution de l’âge moyen à l’accouchement, par rang de naissance de l’enfant

  • Champ : France métropolitaine.
  • Source : Insee, statistiques d’état civil et estimations de population. Rangs de naissance redressés à partir des recensements 1968 à 2008 et de l’enquête annuelle de recensement 2011.

En 2010, 44 % des nouveau-nés sont des premiers enfants

Si les mères tendent à devenir plus âgées au premier accouchement, les âges à la première maternité sont aussi plus dispersés qu’il y a quarante ans. Ainsi, au fil des ans, le pic des naissances s’est à la fois déplacé, de 22 ans en 1967 à 28 ans en 2010, tout en devenant de moins en moins resserré (graphique 2). Aujourd’hui, près de la moitié des premières naissances s’étale entre 25 et 30 ans. Il y a quarante ans, les premières naissances étaient bien plus concentrées autour du pic.

Parmi les enfants nés en 2010, 44 % sont des premiers bébés. Cette part a légèrement augmenté depuis 1967, tout comme celle des deuxièmes enfants. Les naissances de rangs plus élevés sont en contrepartie moins fréquentes : 15 % des bébés nés en 2010 sont des troisièmes enfants et 6 % sont des bébés de quatrième rang ou plus, soit 21 % au total. En 1967, cette part était de 35 %, tout comme celle des premiers enfants. Elle s’est fortement réduite avec la raréfaction des familles nombreuses et la diffusion du modèle de la famille à deux enfants.

Graphique 2Répartition des premières naissances selon l’âge de la mère

  • Note : Calculs d’après les taux de fécondité.
  • Lecture : En 2010, 8 % des premiers bébés ont une mère âgée de 28 ans. En 1967, c’était 4 %.
  • Champ : France métropolitaine.
  • Source : Insee, statistiques d’état civil et estimations de population. Rangs de naissance redressés à partir des recensements 1968,1990 et 2008 et de l’enquête annuelle de recensement 2011.

Les deuxième et troisième enfants arrivent aussi de plus en plus tard

En 2010, les femmes ont en moyenne mis au monde leur deuxième enfant à 30,5 ans, et leur troisième à 32,4 ans (encadré). L’évolution des âges moyens selon le rang des enfants se propage d’un rang à l’autre (graphique 1). Ce sont les arrivées des premier et deuxième enfants qui ont tout d’abord été retardées à la fin des années 1970, alors que l’âge moyen aux rangs supérieurs restait stable. Dans les décennies suivantes, l’âge moyen à l’accouchement augmente pour tous les rangs des enfants, mais à des rythmes légèrement différents ; l’âge moyen au premier enfant augmente le plus rapidement.

Au total, l’âge moyen des mères à l’accouchement, quel que soit le rang de naissance de l’enfant, atteint 30 ans en 2010, contre 27,3 en 1967 (graphique 1).

Plus les femmes sont diplômées, plus le premier enfant arrive tard

Le recul de l’âge des mères à l’arrivée du premier enfant est d’abord intervenu chez les femmes les plus diplômées, avant de se généraliser à l’ensemble des femmes. De fait, le calendrier des naissances varie sensiblement avec le niveau de qualification : les plus diplômées se mettent en couple plus tard, et vivent plus longtemps à deux avant de devenir mères ; elles ont donc leur premier enfant plus tard que les autres (bibliographie). Les diplômées du supérieur sont ainsi celles qui ont leur premier enfant le plus tard : 1,7 an de plus que la moyenne des femmes résidant en France métropolitaine (graphique 3). À la naissance de leur premier enfant, les femmes sans diplôme ont trois ans de moins que la moyenne. Elles commencent donc la constitution de leur famille près de cinq ans avant les diplômées du supérieur.

Graphique 3Écarts d’âge à l’accouchement du premier enfant selon le diplôme de la mère, par rapport à l’âge moyen au premier enfant tous diplômes confondus

  • Lecture : En 2007, l’âge moyen des mères sans diplôme à l’accouchement de leur premier enfant est inférieur de 3,1 ans à la moyenne nationale.
  • Champ : France métropolitaine.
  • Source : Insee, recensement 2008.

Premier bébé  : le plus tôt en Nord - Pas-de-Calais, le plus tard en Île-de-France

L’âge moyen à la première naissance diffère sensiblement d’une région à l’autre (carte). Les femmes ont leur premier enfant le plus tôt dans le nord de la France. Plus on va vers le sud, plus les femmes deviennent mères tardivement. La région Île-de-France se distingue de ses voisines : l’âge au premier enfant y est le plus élevé de France métropolitaine, supérieur de près d’un an à la moyenne nationale. Ces différences régionales reflètent en partie celles des structures de population par diplôme. L’Île-de-France ainsi que les régions Midi-Pyrénées et Provence - Alpes Côte d’Azur, où les femmes ont leurs enfants le plus tard, figurent parmi les régions où les parts de diplômées sont les plus élevées.

Les femmes qui résident dans les départements d’outre-mer (sources) ont leur premier enfant 2,1 ans plus tôt qu’en métropole. Là encore, ceci provient en partie du fait de la structure par diplôme : seulement 37 % des femmes en âge d’avoir un enfant sont titulaires du baccalauréat ou d’un diplôme du supérieur contre 54 % en métropole. Ce calendrier plus précoce des naissances dans les DOM s’accompagne également d’une fécondité plus soutenue.

CarteÉcart d'âge au premier enfant par rapport à la moyenne nationale, selon la région de résidence de la mère

  • Lecture : En 2007, l’âge moyen au premier enfant en Île-de-France est supérieur à la moyenne nationale.
  • Champ : France métropolitaine.
  • Source : Insee, statistiques d’état civil et estimations de population. Rangs de naissance redressés à partir du recensement 2008.

Les femmes immigrées ont leur premier enfant plus tôt

Les femmes immigrées ont leur premier enfant en moyenne six mois plus tôt que les femmes non immigrées (graphique 4). Les femmes d’origine turque deviennent mères le plus tôt, 3,8 ans avant la moyenne des femmes résidant en France métropolitaine. Les femmes originaires d’Afrique ont également un âge moyen au premier enfant plus faible que la moyenne. Il n’y a que très peu de différence à cet égard entre les immigrées du Maghreb et celles de l’Afrique subsaharienne. Ce sont les immigrées nées en Italie ou en Espagne qui ont leur premier enfant le plus tard.

Les écarts peuvent en partie s’expliquer par des comportements différenciés de migration (migration avec ou sans enfant, à l’âge adulte, pour les études, etc), ainsi que par des niveaux de diplôme très différents selon le pays d’origine : les femmes originaires de Turquie sont peu nombreuses à être diplômées du supérieur, celles originaires d’Afrique sont également moins diplômées que la moyenne, alors que les immigrées d’Asie (hors Turquie) et d’Amérique et Océanie sont plus diplômées que la moyenne nationale et ont donc leur premier enfant plus tardivement. Des facteurs culturels peuvent également intervenir, et on peut rapprocher à cet égard l’âge au premier enfant des femmes nées à l’étranger qui accouchent en France et celui enregistré dans le pays en question.

Graphique 4Écart d'âge au premier enfant par rapport à la moyenne nationale, selon le pays de naissance des mères immigrées

  • Note : Les enfants nés avant l’arrivée en France sont également inclus dans l’analyse.
  • Lecture : En 2007, l’âge moyen au premier enfant des immigrées nées en Turquie résidant en France métropolitaine est inférieur de 3,8 ans à la moyenne nationale.
  • Champ : France métropolitaine.
  • Source : Insee, recensement 2008.

Dans l’Union européenne, l’âge au premier enfant est le plus élevé en Italie

C’est en Italie et en Espagne que les femmes deviennent mères le plus tard, à près de 30 ans (graphique 5). Dans les pays du nord de l’UE (Luxembourg, Pays-Bas, Suède, Allemagne), l’âge au premier enfant est supérieur à celui de la France. Les femmes de Roumanie, Bulgarie et des pays baltes ont leur premier enfant le plus tôt, autour de 26 ans. L’âge moyen des mères au premier enfant en France métropolitaine est très proche de la moyenne de l’Union européenne. Les différences européennes d’âge moyen à la maternité ne reflètent pas celles de la fécondité ; d’autres facteurs - économiques, sociodémographiques, culturels ainsi que les politiques publiques - entrent en jeu pour expliquer les écarts nationaux sur ce plan.

Graphique 5 Âge moyen au premier enfant dans l’Union européenne à 27 en 2010

  • * Les données du Royaume-Uni sont calculées sur le champ de l’Angleterre et du Pays de Galles uniquement.
  • ** Les données de l’Italie renvoient à l’année 2007, celles de l’Irlande à l’année 2008 et celles de la Belgique et de Chypre à l’année 2009.
  • Note : Les données de fécondité par rang ne sont pas disponibles pour le Danemark.
  • Champ : Union européenne des 27.
  • Sources : Eurostat, OCDE et instituts nationaux de statistiques.

Combien de temps entre deux naissances ?

Pour chaque mère recensée venant d’avoir un deuxième enfant, on peut calculer combien de mois séparent la naissance du premier et de celui qui vient de naître. La durée moyenne entre les deux premières naissances est alors la moyenne arithmétique de ces durées. Elle est relativement stable depuis le début des années 1980, autour de 3,9 ans, avec une légère tendance à diminuer ces dernières années. Pour les mères concernées, la durée entre le deuxième et le troisième enfant est un peu plus élevée (4,3 ans environ) et suit la même évolution.

La durée moyenne entre deux naissances varie selon le niveau d’études des mères. Les plus diplômées commencent la constitution de leur famille plus tard que les moins diplômées, et ont des naissances plus rapprochées dans le temps. Ainsi, les diplômées du supérieur ont leurs deux premiers enfants avec 3,5 ans d’écart en moyenne, alors que celles qui n’ont aucun diplôme attendent en moyenne 4,2 ans. La durée moyenne entre le deuxième et le troisième enfant est également plus faible pour les plus diplômées (4 ans, contre 4,5 ans pour les femmes sans qualification).

Cette durée moyenne est à distinguer de la différence entre les âges moyens au premier et au deuxième enfant, qui est de 2,6 ans (graphique 1). En effet, l’écart entre deux naissances ne peut se déduire de la comparaison des âges moyens : toutes les mères ayant un enfant n’en auront pas nécessairement un deuxième ; de plus, celles qui ont eu leur premier enfant plus tôt ont plus souvent que les autres un deuxième enfant.

Sources

Les statistiques d’état civil, notamment sur les naissances, sont transmises à l’Insee par les mairies. Elles permettent d’étudier la fécondité, tous rangs de naissance confondus. Les bulletins de naissance de l’état civil ne permettent pas, en revanche, de calculer des âges à l’accouchement par rang de naissance. Les variables qui concernent les accouchements précédents ne sont en effet pas d’assez bonne qualité. L’Insee propose ici une méthode originale qui permet une ventilation fiable des naissances de l’état civil selon le rang.

Pour répartir par rang les naissances enregistrées par l’état civil, on utilise les données du recensement de la population. Les naissances considérées sont celles survenues l’année précédant le recensement. On ne retient que les naissances qu’on sait rattacher à leur mère, i.e. qui résident dans le même foyer (méthode dite « des enfants déclarés au foyer »). On applique la répartition par rang de ces naissances au nombre de naissances enregistrées dans l’état civil (pour des mères de même âge, même lieu de naissance - France/étranger - et même région de domicile). La méthode utilisée (bibliographie) permet de calculer des indices conjoncturels de fécondité (ICF) par rang et des âges à l’accouchement par rang parfaitement cohérents avec les indicateurs globaux publiés chaque année dans le bilan démographique. Le dernier recensement utilisé fournit des statistiques au premier janvier 2008 et permet donc d’étudier la fécondité en 2007. Pour les années plus récentes, seules les enquêtes annuelles de recensement sont disponibles et ne permettent pas une décomposition aussi fine que le recensement complet. C’est pourquoi les données sur l’âge à l’accouchement du premier enfant par diplôme, pays de naissance, ou région de domicile de la mère portent sur 2007.

Pour les DOM, les statistiques d’état civil sur les naissances par âge de la mère ne sont disponibles que depuis 1998. C’est pourquoi l’étude, qui porte sur une période de 40 ans, se restreint à la France métropolitaine. L’âge au premier enfant dans les DOM n’est évoqué que dans la partie sur les disparités régionales.

Définitions

L’âge moyen à l’accouchement, tel qu’il est calculé dans cette étude et publié dans le bilan démographique de l’Insee, neutralise l’effet de la structure par âge des mères et des femmes de 15 à 50 ans. Cet indicateur est dit « calculé par les taux » et peut différer sensiblement de l’âge moyen empirique, moyenne arithmétique des âges de chaque mère lors de l’accouchement. En effet, chaque âge est ici non pas pondéré par les effectifs de mères, mais par les taux de fécondité relatifs à chaque âge (nombre de naissances pour 10 000 femmes de cet âge). Son calcul se rapproche à cet égard de celui de l’indice conjoncturel de fécondité (ICF). Cela permet de comparer les âges moyens dans le temps et entre pays en s’affranchissant des différences de structure par âge. Selon les années ou les pays, en effet, la taille des générations de femmes plus ou moins fécondes change, ce qui peut influencer l’âge moyen à l’accouchement « empirique » sans pour autant signifier de réelles différences de comportements de fécondité.